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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/268

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On commence par l’amour vertueux ; mais à moins que de prendre de sages précautions, l’amour frivole s’y mêlera, et puis l’amour sensuel, et enfin l’amour charnel. Oui, il y a même du danger dans l’amour spirituel, si l’on ne sait pas bien s’armer de défiance et de vigilance ; bien qu’il soit plus difficile d’y prendre le change, parce que la parfaite innocence du cœur lui découvre plus évidemment tout ce qui peut s’y glisser d’impur, en la manière que des taches paroissent plus sur un fond bien blanc. C’est pourquoi quand le démon entreprend de corrompre cet amour tout spirituel, il le fait plus finement, en essayant de faire couler insensiblement dans le cœur quelques dispositions peu favorables à la pureté.

Le discernement de l’amitié sainte et de l’amitié mondaine dépend donc des règles suivantes.

Le miel d’Héraclée est plus doux à la langue que le miel commun, parce que les abeilles le cueillent sur l’aconit, qui lui donne cette douceur extraordinaire ; et l’amitié mondaine a un certain flux de paroles douces, molles, passionnées et pleines de flatteries, sur la beauté, sur la bonne grâce, sur de vains avantages naturels. Mais l’amitié sainte a un langage simple, uni et sincère ; et elle ne peut jamais louer que la vertu et les dons de Dieu, l’unique fondement sur lequel elle subsiste,