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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/303

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couvre. Plusieurs, cherchant à se flatter et à se justifier contre les reproches de leur conscience, jugent volontiers que les autres sont atteints du même vice qu’eux, ou bien d’un aussi grand ; et en même-temps ils se persuadent que le nombre des criminels rend leur péché moins blâmable ; plusieurs aussi se font une occupation d’esprit, et un plaisir de Philosopher par de vaines conjectures sur l’humeur, sur l’inclination et sur les mœurs des autres ; tellement que si par malheur ils rencontrent bien quelquefois dans ces jugemens, ils en deviennent si faciles et si hardis à juger, que l’on a bien de la peine à les en détourner. Mais combien y en a-t-il qui jugent par passion, pensant toujours mal de ce qu’ils haïssent, et toujours bien de ce qu’ils aiment ? Oui, sinon en un seul cas fort étonnant, mais trop véritable ; et c’est que l’excès de l’amour provoque souvent à juger mal de la personne qu’on aime : effet monstrueux d’un amour impur, imparfait, troublé et malade ! Maudite jalousie, qui, comme l’on sait, condamne les personnes de perfidie et d’adultère sur un simple regard, sur la légèreté d’une parole, sur le moindre souris ! Enfin, la crainte, l’ambition et les autres foiblesses de l’esprit contribuent beaucoup et souvent à la production de ces vains soupçons, et de tous ces jugemens téméraires.

Mais quels remèdes à tant de maux ?