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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/304

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L’on prétend que ceux qui ont bu du suc d’une herbe d’Ethiopie, que l’on appelle Ophiusa, s’imaginent voir partout des serpens, et mille objets affreux ; et pour les guérir, il faut leur faire boire un peu de vin de Palmier. Quoiqu’il en soit, je dis que ceux dont l’orgueil, ou l’envie, ou l’ambition, ou la haine a corrompu le cœur, ne voient plus rien qu’ils ne trouvent mauvais et blâmable ; et j’ajoute qu’il n’y a que l’esprit de charité, dont la palme est un symbole, qui puisse les affranchir de cette perverse inclination à faire tant de jugemens téméraires et iniques. La charité craint de rencontrer le mal, bien loin qu’elle aille le chercher ; et quand elle le rencontre, elle se détourne, et fait semblant de ne l’avoir pas vu ; bien plus, elle ferme les yeux pour ne pas le voir au premier bruit qu’elle entend ; et puis par une sainte simplicité elle croit que ce n’étoit pas le mal, mais seulement l’ombre ou quelque apparence du mal. Que si malgré elle, et comme par force, elle reconnoit que c’est le mal. même, elle en détourne aussitôt les yeux, et tâche d’oublier tout ce qu’il est. La charité est donc le grand remède à tous maux, mais spécialement à celui-ci. Toutes choses paroissent jaunes aux yeux des Ictériques ; et l’on dit que pour les guérir, il faut leur faire porter de l’éclaire sous la plante des pieds. Certes, la malice du