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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/309

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pour purifier les lèvres des hommes de toute leur iniquité, comme le Séraphin purifia celles du Prophète Isaïe, pour le rendre digne de bien parler de Dieu ! Certainement, si on avoit banni du monde la médisance, on y auroit exterminé une grande partie des péchés.

Outre le péché que l’on commet en ôtant injustement au prochain son honneur, l’on est obligé de lui en faire une réparation entière et proportionnée à la nature, à la qualité et aux circonstances de la médisance ; car nul ne peut entrer dans le ciel avec le bien d’autrui, et l’honneur est le plus grand et le plus cher de tous les biens extérieurs. Nous avons trois vies différentes : la spirituelle, dont la grâce de Dieu est l’origine ; la corporelle, dont notre âme est le principe ; et la civile, dont la bonne réputation est le fondement : le péché nous fait perdre la première, la mort nous ravit la seconde, et la médisance nous ôte la troisième. La médisance est une espèce de meurtre, et le médisant se rend coupable, par un seul coup de langue d’un triple homicide spirituel ; le premier et le second à l’égard de son âme, et de celle de la personne à qui il parle ; et le troisième à l’égard de la personne dont il détruit la réputation. C’est de la que saint Bernard dit que celui qui fait la médisance, et celui qui l’écoute, ont le diable sur eux, mais