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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/97

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mauvais de soi-même et de son fonds, mais indifférent, et se peut prendre bien ou mal ; l’usage néanmoins en est toujours dangereux, et l’affection qu’on y prendroit, en augmenteroit beaucoup le danger. C’est pourquoi je vous dis, Philothée, qu’encore que ce ne soit pas un péché qu’un jeu réglé, une danse modeste, une riche parure d’habits, sans aucun air de sensualité, une comédie honnête dans sa composition et dans sa représentation, un bon repas sans intempérance ; cependant l’affection qu’on y auroit, seroit entièrement contraire à la dévotion, extrêmement nuisible à l’âme, et dangereuse pour le salut, Ah ! quelle perte, que d’occuper son cœur de tant d’inclinations vaines et folles, qui le rendent insensible aux impressions de la grâce, et qui le consument tellement, qu’il ne lui reste plus ni force ni application pour les choses sérieuses et saintes !

Voilà justement la raison pour laquelle, dans l’ancien Testament, les Nazaréens s’abstenoient, non-seulement de tout ce qui peut enivrer, mais encore de manger du raisin, et même du verjus : ce n’est pas qu’ils crussent que ni l’un ni l’autre les pût enivrer ; mais ils appréhendoient le danger qu’il y avoit, qu’en mangeant du verjus, il ne leur prit envie de manger du raisin, et qu’en mangeant du raisin, ils ne fussent tentés de boire du vin. Je ne dis donc pas, que nous ne puissions jamais