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Page:De Staël – La Révolution française, Tome III.djvu/291

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CONSIDÉRATIONS

deux fois d’être premier ministre, parce qu’il ne s’accordoit pas sous quelques rapports avec le prince qui le nommait. Quelle qu’ait été la diversité des manières de voir sur les motifs de cette résolution, rien ne paroît plus simple en Angleterre que de ne pas vouloir être ministre. Je ne citerais donc pas le refus de lord Grey, s’il avoit fallu, pour accepter, renoncer en rien à ses principes politiques ; mais les scrupules par lesquels il s’est déterminé, étoient poussés trop loin pour être approuvés de tout le monde. Et cependant, les hommes de son parti, tout en le blâmant à cet égard, n’ont pas cru possible d’entrer sans lui dans aucune des places qui leur étoient offertes.

La maison de lord Grey offre l’exemple de ces vertus domestiques si rares ailleurs dans les premières classes. Sa femme, qui ne vit que pour lui, est digne, par ses sentimens, de l’honneur que le ciel lui a départi en l’unissant à un tel homme. Treize enfans, encore jeunes, sont élevés par leurs parens, et vivent avec eux pendant huit mois de l’année dans leur château, au fond de l’Angleterre, où ils n’ont presque jamais d’autre distraction que leur cercle de famille et leurs lectures habituelles. Je me trouvai à Londres un soir dans ce sanctuaire des plus