Aller au contenu

Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/151

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tée et empêchée, et que c’est ce qui fait qu’elle se révèle par des produits déterminés. Mais cet empêchement que la nature rencontre à son activité infinie doit être posé par la nature même ; autrement dit, la nature comme pur sujet doit se poser comme objet ; mais cela n’est possible que s’il y a dans la nature même une dualité ou une duplicité originaire, — une tendance productive et positive d’une part, une tendance anti-productive et négative d’autre part. Ainsi la possibilité de la nature repose sur cette dualité à l’intérieur de la nature créatrice, identique avec elle-même.

Cependant, si les deux tendances opposées dont doit résulter tout produit naturel se supprimaient réciproquement dans ce produit, à la vérité ce produit serait comme non existant, puisque le moment de son apparition serait celui de sa disparition ; il faut donc admettre que, si le produit marque comme un moment d’arrêt dans l’expansion de l’activité productrice de la nature, il doit exprimer à sa façon ce qu’il y a d’infini dans cette activité, et qu’il l’exprime par la capacité qu’il a de produire à son tour d’autres produits et ainsi de se reproduire à l’infini. Et ainsi, tandis que la nature créatrice se concentre un moment en lui, il devient le principe d’une évolution sans fin. Même on peut dire qu’il y a un produit essentiel et primitif, adéquat à la puissance productrice de la nature, et c’est de ce produit essentiel et primitif que les produits particuliers sont des expressions singulières et des formes successives. La nature est donc comme objet un devenir infini qui manifeste dans l’expérience l’infini idéal qu’elle est comme sujet. L’évolution est comme une série régulière de formes dont chacune représente concentrée l’activité de la nature,