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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/179

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quelle le temps et l’espace n’appartiennent pas aux Choses en soi, mais ne sont qu’une forme de mon intuition. Car c’est seulement par le temps et par l’espace que l’Idée une se divise en une multitude d’individus séparés. L’identité de ces deux célèbres paradoxes de ces deux grands philosophes n’a pas été encore remarquée : preuve que, depuis l’apparition de Kant, ni lui, ni Platon, n’a été proprement compris par personne. Or, les deux paradoxes, précisément parce que, tout en disant exactement la même chose, ils la disent en des termes si différents, sont réciproquement le meilleur commentaire l’un de l’autre. » (Nachlass, IV, p. 24.) — « L’Idée platonicienne, c’est la Chose en soi de Kant, c’est-à-dire libre du temps et de l’espace, et par là de la pluralité, du changement, de tout commencement et de toute fin. Elle seule est le ὄντως ὄν ou la Chose en soi. » (Ibid., même page.) — Ce qu’il faut noter, c’est qu’alors, pour Schopenhauer, la Chose en soi n’est une que par rapport aux individus d’une même espèce, autrement dit qu’il y a, pour lui, une pluralité de Choses en soi, comme il y a pour Platon une pluralité d’Idées. À la même époque (1814), il identifiait la Chose en soi et la Volonté : « L’Idée platonicienne, la Chose en soi, la Volonté, — car cela est une seule et même chose… » (Nachlass, IV, p. 191.) Mais une autre démarche de sa pensée a mis un terme hors de cette équation, le terme même qui avait servi à la former, l’Idée platonicienne, et voici ce que dira Schopenhauer, dans Le Monde, en des termes qui rappellent l’une des notes précédemment citées : « Si donc la Volonté est pour nous la Chose en soi, et si l’Idée est l’objectivité immédiate de cette volonté à un degré déterminé, il