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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/180

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nous apparaît que la Chose en soi de Kant et l’Idée de Platon, qui seule est pour lui ὄντως ὄν, ces deux grands et obscurs paradoxes des deux plus grands philosophes de l’Occident sont, à la vérité, non pas identiques, mais très proches parents, et qu’ils ne diffèrent l’un de l’autre que par une détermination. Ces deux paradoxes sont même l’un pour l’autre le meilleur commentaire… » (I, pp. 234-235.) C’est que la disposition de Schopenhauer à chercher un Principe un restait mal satisfaite par la doctrine des Idées qui enveloppait toujours une pluralité correspondant à la différence des genres : la volonté, elle, au contraire, se prêtait mieux à être le nom et la vérité du Principe un : de ce Principe, les Idées ne sont plus que la première manifestation objective, — la plus immédiate, à vrai dire.

Et maintenant, de la philosophie constituée de Schopenhauer, tâchons de dégager les thèses essentielles, surtout dans leur relation au Kantisme.

Le monde est ma représentation : ainsi débute le grand ouvrage ; cette proposition est le point de départ, comme elle est le point d’appui solide de toute philosophie. Ce n’est ni un paradoxe, ni une hypothèse : c’est la vérité la plus certaine, la plus absolue, la plus évidente ; elle signifie, en d’autres termes, que tout ce qui existe pour la connaissance, par conséquent le monde tout entier, n’est objet que par rapport au sujet, n’est en un mot que représentation. On peut dire que c’est à découvrir cette proposition et à en apercevoir tout le sens qu’a aspiré la philosophie moderne ; — et ce sens, c’est la subjectivité nécessaire de la connaissance. C’est ce qu’a déjà fait entendre Descartes, quand il a donné le Cogito