Aller au contenu

Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/32

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avoir la prétention de faire sortir le réel de ses concepts ; il doit se borner à éclaircir par l’analyse les concepts qu’il en a. Qu’un corps soit composé de substances simples, par exemple, c’est ce qui ne peut être établi que par l’analyse du concept de corps, du concept de composition, du concept de substance. Aussi, tandis que le mathématicien procède synthétiquement, en partant de définitions qu’il pose dès l’abord, et dont les éléments, ainsi que les liaisons, se présentent à lui in concreto, le métaphysicien ne peut que poursuivre lentement, difficilement, par une méthode analytique, des définitions du réel. Donc Mathématique et Métaphysique diffèrent radicalement, et s’il fallait chercher pour la Métaphysique un modèle, ce ne serait pas dans la Géométrie qu’il faudrait le chercher, mais plutôt dans cette philosophie naturelle qu’a instituée Newton et qui consiste à déterminer par la combinaison de l’expérience et de la géométrie les forces élémentaires dont dérivent les propriétés des corps. La Métaphysique ne peut être ainsi qu’un effort pour déterminer par l’analyse les notions élémentaires constitutives de nos propositions sur la nature du réel. Mais l’on voit que si Kant ouvre par là des perspectives à la Métaphysique, c’est en constatant qu’elle ne saurait nourrir l’ambition de procéder a priori et par voie de définitions posées dès l’abord : et les difficultés dont la Métaphysique voit déjà sa tâche encombrée, l’impossibilité où elle est de déterminer catégoriquement le rapport des concepts au réel, la nécessité où elle se trouve de chercher dans l’expérience ce qu’elle devrait découvrir par pure raison, l’amènent à se départir de ses prétentions positives pour se convertir en discipline purement limitative et