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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/57

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direction de sa pensée que tout son système lui interdisait. S’il y a des passages de Kant qui semblent contredire cette interprétation, c’est qu’ils ont été mal compris, et Fichte renvoie Reinhold là-dessus à un traité de lui qui va paraître.

Ce traité, c’est la Seconde Introduction à la Doctrine de la Science (1797). Fichte là prétend résoudre la question purement historique qui est celle-ci : Kant a-t-il réellement fondé l’expérience, considérée dans son contenu empirique, sur quelque chose de différent du moi ? Sans doute tous les kantiens en général, à l’exception de Beck, dont le Point de vue a du reste paru après la Doctrine de la Science, ont ainsi compris Kant, et sans doute il y a quelque impertinence à venir dire : Moi seul ai bien vu. Mais il est à observer que la découverte, d’après laquelle Kant n’aurait pas admis un quelque chose distinct du moi, n’est rien moins que nouvelle, et c’est chez un critique de Kant qu’elle apparaît, chez Jacobi. — Aujourd’hui cependant encore, Reinhold, bien que converti à la Doctrine de la Science, soutient la même interprétation que tous les kantiens, tout en déclarant la thèse de Kant fausse. Mais si c’était là une thèse kantienne, la doctrine de Kant ne serait pas critique, mais dogmatique ; ou plutôt ce serait le plus étrange mélange du plus grossier dogmatisme et de l’idéalisme le plus décidé. Mais ce n’est pas là le Kantisme de Kant, c’est le Kantisme des kantiens qui, par habitude invétérée, ont tiré du dogmatisme de là où il ne devait y avoir que l’idéalisme transcendantal. Lorsque les sceptiques, comme l’auteur d’Énésidème, constatent la contradiction qu’il y a entre l’acceptation de la chose en soi et le seul usage légitime des catégories, ne devraient-ils pas plutôt être préve-