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Page:Delbos - De Kant aux postkantiens, 1940.djvu/77

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Le hégélianisme est, lui, en pleine conscience, le triomphe de l’esprit systématique. La science de l’absolu, dit Hegel, est essentiellement système, parce que le vrai, en tant que concret, n’est tel qu’en se développant en lui-même et en gardant dans ces développements son unité. Une philosophie sans système ne peut rien avoir de scientifique. Elle exprime bien plutôt une opinion subjective, et son contenu n’est qu’un contenu contingent, le contenu ne trouve sa justification que comme moment d’un Tout (Encyclopädie, Einleitung, § 14. Werke, t. VI, p. 22). De la constitution du système, Hegel élimine même toute façon de le constituer qui serait viciée d’apparence irrationnelle, ou qui le présenterait dans une sorte d’extériorité vis-à-vis de la pensée. Nous avons vu comnment Fichte opposait en quelque mesure le système du savoir, en lui-même réel et infaillible, à la pensée philosophique qui en poursuit la représentation intellectuelle, comment il livrait la pensée philosophique aux tâtonnements et à l’inspiration du génie. Hegel, lui, fait précéder l’exposé systématique de la vérité absolue et en soi d’une histoire systématique du développement de la conscience jusqu’au moment où elle atteint le principe du savoir absolu, et c’est là l’objet de la Phénoménologie de l’esprit (1807). Il montre également dans l’histoire de la philosophie une seule et même philosophie qui a parcouru différents degrés avant de se comprendre dans la philosophie vraie. Quant au système, il enferme en lui-même une telle puissance de justification pour tout ce qui entre en lui, que l’on peut indifféremment, déclare volontiers Hegel, le prendre par un côté ou par l’autre : que l’on se place à l’origine pour exposer la genèse progressive de toute réa-