La voix sortait, toute rauque, des lèvres tremblantes de Varvara.
— Son sort ne te regarde pas. Je t’en ai prévenue naguère, il est perdu pour toi. Et maintenant, écoute ceci : je t’avais défendu de te marier, je t’avais dit que, de près ou de loin, tu serais toujours sous ma domination. Or, tu m’as désobéi en épousant Armaël Dourzen.
— J’en avais le droit ! cria-t-elle.
Un sursaut de révolte la secouait. À son visage blême montait un flot de sang et dans les yeux s’allumait une lueur ardente.
— … Vous me considériez comme une esclave. Mais, moi, je voulais être libre. Vous m’aviez pris mon enfant ; j’étais sans famille, sans fortune. Un honnête homme m’a aimée, m’a offert son nom…
— Et tu as accepté, en te gardant de lui dire… que tu étais déjà ma femme.
— Votre femme ?… Votre femme. Misérable imposteur ! Vous osez me railler avec ce mot !
Elle se redressait, frémissante d’indignation, devant le comte impassible, dont un rictus soulevait la lèvre.
— Ah ! dans quelle misère morale m’aviez-vous enlisée ! Qu’aviez-vous fait de moi pour que, en acceptant la recherche d’Armaël, je commette cette faute de lui cacher ce qui l’aurait éloigné de Varvara Tepnine !
— Oui, tu as trouvé cela tout simple, pour acquérir un nom, une situation honorables et la protection d’un époux contre moi, dans la