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Page:Delly - L ondine de Capdeuilles.pdf/26

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L’ONDINE DE CAPDEUILLES


âme où la souffrance se renfermait, âpre et profonde. Quand il était loin de tout regard, seulement, sa physionomie changeait, comme à cet instant où l’ironie habituelle s’en détachait pour laisser toute la mélancolie environnante se répandre dans les yeux ardents, qui s’assombrissaient.

Il murmura d’une voix sourde, avec une sorte de passion âpre :

— La mort… la mort partout. Elle m’a pris mon frère, la maudite… Ou plutôt, n’est-ce pas la vie, l’amour qui l’ont tué d’abord, par leurs désillusions atroces ? Quand la mort est venue, elle a parachevé leur œuvre, voilà tout.

Un sec petit bruit de chute traversa le silence. Un marron se détachait, frappait une branche d’arbre, tombait sur un banc de pierre noirâtre et de là sur le sol mou, près d’Odon.

M. de Montluzac quitta l’ombre des arbres. À la lumière, il respira mieux. L’étreinte douloureuse se desserra. Il flâna un instant à travers la végétation sauvage, alla examiner de près un Cupidon de bronze sur le corps duquel s’étendaient de longues traînées de vert-de-gris. Tandis qu’il le considérait, un sourire mauvais crispa ses lèvres, sous la moustache d’un blond foncé.

— Tu as fait mourir Bernard, petit dieu