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Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/181

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cette accusation sans objet, étaient, au contraire, des fantaisistes au théâtre, parce qu’ils n’y voyaient pas alors un champ d’étude assez sérieux et assez sévère pour y transporter de la vraie réalité. Pour eux, les planches étaient le domaine du rêve, l’optique de la rampe déformait les objets, oblitérait les idées, et les décors en toile peinte donnaient des notions très insuffisantes de la solidité des milieux. Aussi n’eussent-ils voulu jeter sur ces planches que des conceptions aériennes et mettre au point du dix-neuvième siècle des fantaisies tout à fait idéales, comme les comprenait Shakspeare. Voilà, du reste, leur profession de foi d’alors sur ce grave sujet ; elle est écrite tout naturellement en tête du volume intitulé Théâtre : « Nous entrevoyions si peu le théâtre de la réalité que, dans la série des pièces que nous voulions faire, nous cherchions notre théâtre à nous exclusivement dans des bouffonneries satiriques et dans des féeries. Nous rêvions une suite de larges et violentes comédies, semblables à des fresques de maîtres, écrites sur le mode aristophanesque, et fouettant toute une société avec de l’esprit descendant de Beaumarchais et parlant une langue ailée, une langue littéraire parlée

« Mais ce qui nous paraissait surtout tentant à bouleverser, à renouveler au théâtre, c’était la féerie, ce domaine de la fantaisie, ce cadre de toutes les imaginations, ce tremplin pour l’envolement dans l’idéalité !… Je ne suis pas un réaliste au théâtre, et, sur ce point, je suis en complet désaccord avec mon ami Zola et ses jeunes fidèles. Et cependant, je dois l’avouer, Zola semble logique quand il demande, quand il appelle, quand il espère pour le réalisme, un théâtre, ainsi que le romantisme a eu le sien. — « Mais, lui dirai-je, que valent nos bonshommes, à nous tous,