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Page:Delzant - Les Goncourt, 1889.djvu/301

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XXXI

Les amitiés (suite). — M. et Mme Alphonse Daudet.

Dans les années qui suivirent la mort de son frère, après les secousses et les émotions du siège, le cœur de M. Edmond de Goncourt était bien vide. Sa santé était mauvaise ; on avait essayé vainement de lui administrer le mariage comme un remède, quand une amitié nouvelle et réchauffante vint faire diversion à sa solitude et à sa tristesse.

Au mois de mai 1874, M. A. Daudet avait publié la première série (qui n’a pas eu de suite) de ses Femmes d’artistes, livre profond et triste dont un célibataire résolu devait goûter particulièrement l’âpreté. M. E. de Goncourt lui écrivit :

Dimanche, 31 mai 1874.
Mon cher ami,

Vous faites de la modernité tout exquise. C’est observé et écrit et peint ! Vous avez l’œil et la patte de l’artiste, de l’artiste vrai, et, quand je vous lis, votre prose me gratouille dans le plus profond de mon moi d’écrivain. Que la Transtéverine est nature, et quel petit chef-d’œuvre que la Menteuse, un type que chacun de nous a rencontré, hélas, une fois au moins dans sa vie.

Mais n’y aurait-il pas moyen de vous dire, autrement que par la petite poste, tout le plaisir que m’a donné votre volume ? Si vous veniez déjeuner vendredi ou samedi à Auteuil ? Hein ? Si vous aviez la puissance de vous faire accompagner par le délicat écrivain que vous m’avez fait connaître, on lui ferait un fort bouquet de roses, de roses dignes d’elle !

Tout à vous et une ligne de réponse.
Edmond de Goncourt.

On devine que le délicat écrivain est l’auteur de