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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/129

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déployer toutes les grâces de son corps ; puis, s’enfuyant tout à coup, il s’était écrié : Non, non, jamais !

La triste Lélia avait demandé bien souvent au ciel, dans ses prières, l’explication de ces brusques paroles. On eût dit un jour qu’une voix céleste lui avait annoncé que sa prière était entendue ; ses joues si pâles se couvrirent d’un doux incarnat, ses yeux s’animèrent d’une expression de bonheur. Oh ! sans doute, elle était heureuse !… Elle avait lu dans le cœur de Lucien.

Riante et légère, elle courut à l’artiste, et, avec un mélange de coquetterie enfantine et de folâtrerie, elle pressa de ses lèvres purpurines les lèvres presque froides de l’homme qu’elle aimait, et, dans sa naïve candeur de jeune fille, elle lui dit : « Tes amis disent que je suis belle, Lucien ; tu m’appelles ta sœur. Est-il possible d’aimer plus qu’un frère ? Et tu m’aimes bien comme une sœur, car tu me l’as dit, et ta bouche n’a jamais su mentir. Oh ! oui, Lucien, je commence à croire que je suis belle, car toi peux-tu aimer ce qui n’est ni beau ni sublime ? J’en suis fière maintenant, car je puis contribuer à ta gloire, car je puis te servir de modèle, faire quelque chose pour ton bonheur ; car tu seras heureux, lorsqu’on admirera ton œuvre, d’entendre murmurer ces mots avec enthousiasme :