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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/212

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Si je ne me suis pas enfin jeté moi-même après lui, c’est que je savais trop bien, Monsieur, que rien n’échappe à ces gouffres perfides et que ma mort n’aurait été qu’un crime devant Dieu !

Le lendemain matin le hasard ayant amené par ici le vieux François, que vous connaissez peut-être, il me trouva là, à genoux sur cette même pierre que voici, pleurant mon pauvre maître et priant pour lui !… Je lui contai tout, et il mêla ses larmes aux miennes.

Au bout d’un mois d’attente, après avoir passé toutes mes journées à regarder, à chercher si je ne verrais point, par hasard, jaillir du sein de l’abîme les restes du pauvre enfant que j’avais tant aimé, je partis pour Paris afin d’aller rejoindre mes maîtres dont je n’avais pas osé affronter plus tôt les justes reproches.

Durant une année entière que je restai encore au château, jamais ni M. le comte, ni Mme la comtesse ne m’adressèrent une seule fois la parole. Aussi profitai-je d’un petit héritage qui m’échut pour quitter leur service et me retirer, aux environs d’ici, dans une petite campagne que je cultive moi-même.

Là je vis pauvre, mais au moins tranquille. Je ne vois pas sans cesse passer et repasser devant moi comme un remords, ce silence triste et résigné de