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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/251

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vallée si douce, que l’âme y reste captive et s’y croit enchantée. De grands troupeaux allaient et venaient dans ce paradis, bondissant comme l’avalanche, sous la conduite de leurs pasteurs, à la voix sonore de leurs chiens blancs comme la neige nouvelle. Mais, chose horrible à penser ainsi qu’à dire ! pasteurs, chiens et troupeaux, enlevés de terre par une force irrésistible, montaient vers le plateau magique et s’engouffraient dans la bouche du serpent, qui se dilatait alors d’appétit et de joie pour les recevoir.

« Et cela durait depuis très-longtemps et d’innombrables victimes avaient déjà succombé, en sorte que tout le pays n’était que larmes, gémissement et consternation.

« Or, il se trouvait dans le village d’Arbouix, bâti au flanc de la montagne si verte, un homme qui avait beaucoup de courage, et cet homme n’avait pas moins d’adresse que de courage. Et il résolut de délivrer son pays. Dans ce but, il établit une forge au lieu le plus secret qu’il put trouver, et là, il forgeait du fer, et lorsque le fer était rouge, il le mettait à la portée du serpent, au péril de sa vie, bien qu’il eût soin de se retirer aussitôt. Le monstre qui regardait de côté et d’autre, cherchant une proie, dès qu’il voyait le fer rouge, l’aspirait comme toute autre chose, et par la puissance de