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Page:Des Monts - Les Legendes des Pyrenees 3e, 1876.djvu/29

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matin au soir, il entassait sans cesse blasphèmes sur jurons et jurons sur blasphèmes.

— Allons, amis, continua-t-il, sans écouter plus longtemps ce vieux fou, mettons-nous en mer.

— En mer ! répétèrent-ils tous en s’élançant vers leurs barques.

Un instant après quatre ou cinq chaloupes s’éloignaient du rivage malgré les sages avis du vieux Jacques ; mais quiconque les eût bien observées eût pu remarquer que Limbey était seul dans la sienne. Quoique ils affectassent de se soucier peu des lugubres avertissements du vieillard, les compagnons de l’impie pêcheur n’avaient pu se défendre d’une instinctive terreur en l’entendant.

Et cependant la mer était si calme, le ciel si pur, la soirée si belle que tout danger semblait chimérique. Le soleil resplendissant de lumière descendait majestueusement à l’horizon comme un vaisseau d’or aux voiles de pourpre ; les flots unis et silencieux se laissaient lutiner par de petites vagues capricieuses et folâtres ; toute une pluie d’étoiles enfin commençait à diaprer un coin du ciel de ses pointes diamantées.

Tout à coup on entendit au loin les grondements du tonnerre ; en un instant le ciel s’assombrit et déroula comme un linceul grisâtre, sous les yeux des pêcheurs attérés, sa vaste tenture de