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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/147

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dent que ces combinaisons se font en nous sans aucune intervention étrangère ; il ne l’est pas moins que nos sensations de souvenirs, de jugemens et de desirs sont aussi des choses qui se passent uniquement dans notre intérieur. Or, qu’est-ce qui empêcherait qu’il n’en fût de même de nos sensations proprement dites ? et que, tandis que nous croyons voir, entendre, goûter, sentir, toucher des êtres réels et distincts de nous, ces impressions ne fussent que des modifications internes de notre faculté de sentir, des manières d’être produites en elle par des raisons inconnues, mais sans aucune cause extérieure, comme celles que nous éprouvons dans certains rêves nous nous croyons actuellement frappés par des corps qui bien certainement sont alors fort éloignés de nous, ou comme celles que nous ressentons même éveillés, dans certaines circonstances, ainsi que nous en avons fait la remarque aux chapitres de la Sensibilité et de la Mémoire.

Cette supposition n’est point absurde. Cependant, si elle était conforme à la vérité, cette plume que je crois tenir, ce papier sur lequel je crois en ce moment tracer ces