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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/280

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de nos perceptions, de ne pas le sentir tel qu’il est, c’est-à-dire tel qu’il doit nous paraître en vertu de notre organisation, et tel qu’il paraîtrait à tous les êtres organisés comme nous, s’ils étaient exactement dans la même position. C’est cette nécessité qui constitue la certitude et la réalité de tout ce que nous connaissons ; car s’il ne dépendait que de notre fantaisie d’être affectés d’une chose grande comme si elle était petite, d’une chose bonne comme si elle était mauvaise, d’une chose vraie comme si elle était fausse, il n’existerait plus rien de réel dans le monde, du moins pour nous ; il n’y aurait ni grandeur ni petitesse, ni bien ni mal, ni faux ni vrai : notre seule fantaisie serait tout. Un tel ordre de choses ne peut pas même se concevoir, il implique contradiction. Notre jugement est donc bien indépendant de notre volonté en ce sens ; mais il en dépend en ce que, comme nous l’avons vu, nous sommes maîtres, jusqu’à un certain point, de considérer telle perception et de rappeler tel souvenir plutôt que d’autres, et de donner notre attention plutôt à un de leurs rapports qu’à un autre. Ainsi c’est à proportion que nous soumettons notre sensibilité et notre mé-