Aller au contenu

Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/358

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les a attachés. Nous avons appelé langues ou langages tous ces systèmes de signes en donnant à ces deux mots leur signification la plus étendue ; et c’est au moyen de ces langues que nous communiquons avec nos semblables. Telle a été, sans doute, l’intention qu’on a eue en les composant : un homme isolé n’aurait jamais conçu l’idée de se faire une langue ; il n’en aurait pas éprouvé le besoin ; il n’aurait pas deviné que cela pût lui être d’aucun avantage. Cependant la transmission des idées est bien loin d’être la seule utilité des langues ; elle n’en est pas même la principale. Elles ont une propriété bien plus précieuse, quoique bien moins remarquée, et dont nous avons retiré les plus grands avantages pendant bien des siècles, sans nous en apercevoir. C’est ainsi qu’il arrive souvent à l’homme en tendant vers un but d’en atteindre un autre beaucoup plus important sans s’en douter ; un homme de génie arrive, qui lui montre ce qu’il a déjà fait et ce qu’il peut faire encore.

Condillac est, je crois, le premier qui ait observé et prouvé que sans signes nous ne pourrions presque pas comparer nos idées