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Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/397

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j’avoue que je n’aime pas cette façon de s’exprimer, car je ne vois pas ce que peut être l’action de percevoir une sensation, si elle n’est pas une des opérations particulières de la faculté de penser ; ni ce que peut être l’action de penser, si elle n’est pas toujours celle de sentir, modifiée de mille manières. Dans notre langage nous devons donc dire, sans hésiter, que nous commençons à penser avant d’avoir des signes artificiels.

Il n’est pas aussi aisé de déterminer précisément jusqu’où irait notre faculté de penser si elle n’avait le secours d’aucun de ces signes, je ne vois même point de moyen de le savoir avec certitude ; mais, d’après tout ce que nous avons dit précédemment, il n’y a nul doute que sans les signes toutes les réunions que nous faisons de nos idées seraient aussitôt dissoutes que formées ; que les rapports que nous remarquons entr’elles seraient aussitôt évanouis que perçus, et que par conséquent toutes combinaisons ultérieures nous deviendraient impossibles, et nous serions toujours arrêtés dès les premiers pas : nous en avons même la preuve directe dans l’impossibilité où nous sommes de faire les moindres calculs sans noms de