Aller au contenu

Page:Destutt de Tracy - Élémens d’idéologie, première partie.djvu/76

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

c’est employer son temps d’une manière très-stérile et qui n’apprend rien. Vouloir la deviner, lui supposer des causes et des origines, est très-dangereux ; c’est une source inépuisable d’égaremens et d’erreurs. La seule chose utile est d’étudier ce qui est ; cela conduit à le connaître et à en tirer tout le parti possible pour notre avantage. Suivons donc nos recherches.

On demande s’il est de l’essence de la mémoire que, quand nous sentons un souvenir, nous sentions qu’il est la représentation d’une impression passée, c’est-à-dire que nous sachions toujours que c’est un souvenir. Je réponds que non ; car il m’arrive souvent d’avoir une idée que je crois nouvelle pour moi, et, le moment d’après, je trouve que depuis long-temps je l’ai écrite quelque part, preuve sans réplique que je puis avoir un souvenir sans avoir en même temps la conscience que c’est un souvenir. C’est-là une preuve de fait bien suffisante, car elle est péremptoire ; cependant on peut encore y ajouter une preuve de raisonnement. En effet, sentir une impression actuelle à l’occasion d’une impression passée, c’est-là le propre de la mémoire. Mais ensuite re-