Aller au contenu

Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 2.djvu/132

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

« Madame Skewton, je vous présente ma fille Florence, dit M. Dombey en se tournant du côté de la vieille dame.

— Charmante personne, dit la dame en mettant son lorgnon. Elle est si naturelle ! Ma chère Florence, il faut que vous m’embrassiez, s’il vous plaît. »

Florence l’embrassa, puis se tourna vers l’autre dame près de laquelle se tenait son père, qui semblait attendre que sa fille eût embrassé Mme Skewton.

« Edith, fit M. Dombey, je vous présente ma fille Florence. Florence, cette dame sera bientôt votre maman. »

Florence tressaillit ; en proie à mille émotions, le visage inondé de pleurs que faisait couler ce nom de maman, luttant pendant quelques instants avec les sentiments de surprise, d’intérêt, d’admiration, sous l’influence d’une terreur indéfinissable, Florence leva ses regards sur la belle figure qu’elle avait devant elle, puis elle s’écria : « Oh ! papa, puissiez-vous être heureux ! puissiez-vous être très-heureux toute votre vie ! » et elle tomba en sanglotant sur le sein de cette dame.

Il y eut un moment de court silence. La belle dame, qui, au premier abord, avait paru hésiter et ne pas savoir si elle s’avancerait ou non au-devant de Florence, la retint sur elle, et pressa la main qui s’accrochait convulsivement à sa robe, comme pour la rassurer et la consoler. Pas un mot ne sortit de sa bouche. Elle pencha sa tête sur Florence, la baisa sur le cou, mais demeura muette.

« Voulez-vous venir dans les appartements, dit M. Dombey, voir un peu ce que font les gens ? Si vous voulez bien, chère madame. »

En disant cela, il offrit son bras à Mme Skewton, qui lorgnait Florence, comme si elle se figurait ce qu’on pourrait faire de cette jeune fille avec une légère infusion d’un peu plus de cœur et de belle nature… puisé, bien entendu, à l’abondant dépôt que cette dame tenait en réserve.

Florence pleurait encore contre le sein de l’étrangère et s’attachait toujours à elle, lorsqu’on entendit M. Dombey qui disait, de la galerie vitrée :

« Nous allons demander à Edith… Mon Dieu, où est-elle donc ?

— Edith, ma chère, s’écria Mme Skewton, où êtes-vous donc ? Vous cherchez sans doute M. Dombey quelque part. Nous sommes ici, mon ange. »

La belle dame se détacha des étreintes de Florence, et dé-