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Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 2.djvu/173

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« Mon cher Dombey, dit la tendre maman, je crains bien d’être obligée de renoncer à Florence, et de la laisser retourner chez elle, comme elle en a elle-même l’intention. Après la perte que je fais aujourd’hui, mon cher Dombey, je sens que je n’aurais pas même le courage de lui tenir compagnie.

— Ne ferait-elle pas mieux de rester avec vous, réplique le marié.

— Je ne le crois pas, mon cher Dombey ! Non, je ne le crois pas. Je serai mieux seule. D’autant plus que ma bonne Edith sera, à son retour, sa protectrice naturelle et constante ; je ferai mieux de ne pas empiéter sur ses droits. Elle pourrait en être jalouse ; n’est-ce pas, bonne Edith ? »

La tendre mère, en disant cela, serre le bras de sa fille ; pour attirer son attention ; peut-être.

« Sérieusement, mon cher Dombey, reprend-elle, je me séparerai de cette chère enfant, pour ne pas la faire souffrir de ma tristesse. Nous venons de convenir de cela tout à l’heure. Elle comprend mes raisons parfaitement, mon cher Dombey. Edith, ma bonne… n’est-ce pas qu’elle comprend parfaitement ? »

La bonne mère presse encore le bras de sa fille. M. Dombey n’ajoute aucune observation ; d’ailleurs, voici le ministre et son desservant.

Mme Miff et le bedeau, M. Sownds, conduisent les futurs conjoints à leurs places devant l’autel.

« Qui donne la main de cette femme à cet homme[1] ? »

C’est le cousin Feenix qui la donne. Il arrive de Baden-Baden tout exprès pour cela. Que diable ! quand il entre dans la famille un riche personnage, c’est bien le moins qu’on lui témoigne quelque déférence, il faut faire quelque chose pour lui. C’est ce que disait le cousin Feenix (c’est un bon enfant, le cousin Feenix), il répond donc : « C’est moi qui donne la main de cette femme à cet homme. » Le cousin Feenix, qui se figurait aller en droite ligne du côté de la mariée, tandis que ses jambes obstinées le faisaient aller de côté, donne tout de travers à cet homme la main de cette femme, c’est-à-dire qu’il va prendre une demoiselle d’honneur de qualité, alliée de loin à la famille, et de l’âge de Mme Skewton, à dix ans près. Mais le chapeau de Mme Miff intervient, fait tourner notre cousin,

  1. Texte de la liturgie anglicane pour les mariages.