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Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/116

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tion, — dit-il, — après un petit examen discret de lui-même, — je vous demande la permission de retourner pour un moment auprès de Mademoiselle Obenreizer. J’ai conclu d’un mot que vous m’avez dit tout à l’heure qu’elle répondait à vos sentiments.

— C’est vrai, — fit Vendale, — j’ai l’inexprimable bonheur de savoir qu’elle m’aime.

Obenreizer demeura d’abord silencieux. Le nuage couvrit ses prunelles, le battement imperceptible agita ses joues.

— Excusez-moi quelques minutes, — dit-il avec sa politesse cérémonieuse, — je voudrais parler à ma nièce.

Puis il salua Vendale et quitta la chambre.

Vendale, demeuré seul, se mit à rechercher la cause de ce refus inattendu qu’il rencontrait. Obenreizer l’avait constamment empêché depuis quelques mois de faire sa cour à Marguerite. Maintenant il s’opposait à un mariage si avantageux pour sa nièce, que son esprit ingénieux même ne pouvait trouver à l’encontre aucune raison sérieuse. Incompréhensible conduite que celle d’Obenreizer ! Qu’est-ce que cela voulait dire ?

Pour se l’expliquer à lui-même, Vendale descendit au fond des choses ; il se souvint qu’Obenreizer était un homme de son âge, et que Marguerite n’était sa nièce qu’à demi. Avec la prompte jalousie des amants, il se demanda s’il n’avait pas en même temps devant lui un rival à redouter et un tuteur à conquérir. Cette pensée ne fit que traverser son esprit ; ce fut tout. La sensation du baiser de Marguerite qui brûlait encore