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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/1024

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CRA

maillère d’un cran. Les Podomètres à chaque pas qu’on fait avancent d’un cran.

Cran, en termes de Manège, se dit des inégalités ou replis de la chair, qui sont comme des sillons posés de travers dans le palais de la bouche du cheval. Crenæ. Il faut donner un coup de corne au troisième, au quatrième cran de ce cheval, pour le saigner.

En termes de Marine, mettre un vaisseau en cran, c’est le mettre sur le côté pour le caréner, ou suiver. Navem in latus statuere. Voyez Carener.

CRAN. Ce mot, en termes d’Imprimerie, signifie cette petite profondeur, ou canal qui est vers le bas de chaque caractère, & qui se fait dans la fonte même.

On dit figurément & familièrement hausser ou baisser d’un cran ; pour dire, augmenter ou diminuer. Sa fortune, sa réputation, sa santé ont baissé d’un cran, c’est-à-dire, diminuent, baissent ou commencent à diminuer.

☞ CRAN, nom du Raifort sauvage. Voyez Raifort.

CRANCELIN ou CANCERLIN. s. m. terme de Blason, qui se dit d’une portion de couronne posée en bande à travers un écu, qui se termine à ses deux extrémités tant du côté du chef, que de la pointe.

CRAND. s. m. terme de Coutumes, sûreté, assûrance. Crand de dettes. Crand semble aussi signifier ce qui est prêté. Creditum.

CRÂNE. s. m. terme d’Anatomie. Assemblage de plusieurs os, boîte osseuse qui couvre & qui renferme le cerveau, le cervelet & la moelle alongée. Cava, cavaria. Le crâne se divise en deux tables, qui sont comme deux lames appliquées l’une sur l’autre, entre lesquelles il y a le diploë, qui est une substance moëlleuse, pleine de cellules de différente grandeur. Il est percé de plusieurs trous qui donnent passage à la moelle de l’épine, aux nerfs, aux artères & aux veines. Sa figure est ronde & un peu longue ; car elle avance par derrière, & s’aplattit par les deux côtés vers les temples. Il est composé de huit os, qu’on appele propres, qui sont l’os du front, celui de derrière la tête, les deux pariétaux, & les deux des temples. Dans les éminences des os des temples est contenu l’organe de l’ouie avec les quatre osselets qui y servent ; savoir, l’étrier, l’enclume, le maillet & le circulaire. Outre cela il y en a deux communes, le sphénoïde & l’ethmoïde, qui sont expliqués à leur ordre. Le crâne a quatre sutures communes qui le divisent d’avec la mâchoire. Il en a de propres, dont il y en a trois vraies, la coronale, la sagittale, & la lambdoëde. Il y en a trois fausses, qu’on nomme aussi squammeuses, ou temporales, qui sont aussi expliquées à leur ordre. Velschius, dans ses Observations de Physique & de Médecine, parle d’un homme dont le crâne se trouva après sa mort épais d’un doigt, & sans suture, & qui néanmoins ne s’étoit jamais plaint de maux de tête pendant sa vie.

Ce mot de crâne est dérivé de κράνος, mot Grec qui signifie, galea, armet, ou morion, parce qu’il sert à défendre le cerveau comme un casque. κρανίον, Cranium, le crâne, vient du celtique Cren, qui est ainsi nommé à cause de sa rondeur. Pezron.

CRANEQUIN. s. m. terme de l’art Militaire, instrument de fer dont on se servoit autrefois en France pour bander l’arc. On l’appelle autrement pié de biche.

CRANEQUINIER. s. m. C’est le nom qu’on donnoit autrefois à certains Arbalétriers à pié & à cheval, qui portoient des arbalètes légères faites premièrement de bois, puis de corne, & enfin d’acier. Elles se bandoient avec un bandage de fer attaché à la ceinture, qu’on appeloit cranequin ; d’où est venu ce nom, que Philippe de Commines croit être allemand. Il y avoit autrefois un Grand Maître des Arbalétriers & Cranequiniers, à la charge duquel le Grand Maître de l’Artillerie a succédé. Dans les auteurs latins on les appelle Crenkinarii. Voyez les Rem. sur la Sat. Mén.

CRANGANOR, Cranganor, Ville des Indes Orientales dans la presqu’Île de deçà le Gange, capitale d’un Royaume de même nom, qui appartient au Roi de Calécut ; elle est sur la côte de Malabar ; elle a un Archevêché, & il y a plusieurs Chrétiens de S. Thomas. Les Hollandois ont pris Cranganor aux Portugais, qui en étoient autrefois maîtres. Voyez Maffée, Hist. Ind. L. II. Jarric. L. VI, C. 14. & Gorea, de Progr. Eccl. L, II. c. 19.

CRANOSTAW, petite ville de Pologne dans la Russie rouge, sur la rivière de Wiepertz.

CRANSAC. Ce lieu est dans le bas Rouergue ; les eaux minérales qui en portent le nom n’ont aucune odeur sensible, leur saveur est un peu âcre & vitriolique. Douze onces de ces eaux ont donné par l’évaporation dix-huit grains d’un sel gris tirant sur le blanc, d’un goût salé & légerement vitriolique. On les regarde comme apéritives & purgatives, & on les emploie avec succès dans les maladies provenantes d’obstruction. Hist. de l’Acad. des Sc. année 1705, p. 67.

CRAON. s. m. Credo Andegavortum. Le Craon est une rivière d’Anjou.

Craon. Credo, Credonitum, petite ville de France sur l’Oudon dans l’Anjou, & non point sur le Craon, comme l’a cru Masson, qui dit qu’elle tire son nom de cette rivière.

CRAONOIS, Credonensis ager, prononcez Cranois ; plusieurs même l’écrivent ainsi : territoire de Craon. Valois, Notit. Gal. p. 162. Pagus, ou ager Cratumnensis.

CRAPAUD. s. m. animal venimeux dont la figure approche de la grenouille, excepté qu’il se traîne, & que la grenouille saute. Bufo. Le crapaud n’a point de dents, & ne laisse pas de mordre dangereusement avec ses babines. Il jette son venin par son urine, sa bave & son vomissement sur les herbes, & particulièrement sur les fraises & les champignons, dont il est fort friand. Le plus dangereux crapaud est celui qu’on appelle Crapaud verdier, ou graisset, ou raine verde, en Latin bufo. Il se gonfle pour jeter plus loin son urine sur les herbes, qui n’est pas moins venimeuse que le napellus. Son sang est mortel, de même que la poudre qu’on en fait. On dit que les crapauds forcent les petits oiseaux & les belettes à se jeter eux-mêmes dans leurs gueules. On dit la même chose de quelques serpens ; mais cela est fort suspect. Le crapaud pour ennemi le bussard, qui le dévore sans qu’il lui arrive aucun mal. Rond.

Les canards mangent aussi des crapauds, sans en ressentir aucun mauvais effet. Ces observations, & quelques autres paroissent rendre suspecte la qualité vénéneuse du crapaud. Mais d’un autre côté Il y a tant de faits contraires, & qui paroissent démontrer l’existence de ce venin, qu’il y auroit au moins de l’imprudence à s’exposer au danger.

Quelques-uns ont cru que les Rois de France avoient eu d’abord pour armes trois crapauds ; c’est une fable. Sous le règne de Pharamond les Francs s’habituèrent sur les rives du Rhin, & des marais de Westphalie, où sont les Duchés de Clêves, Gueldres, Juliers, la Frise, la Hollande, la Zélande & le Brabant, près de Cologne & de Liège, où sont les Ribarols. De cette demeure en ces lieux aquatiques & marécageux ils furent appelés Ribarols, ou Ripuaires, & de-là est venue la fable de ceux qui ont cru que Pharamond portoit en armes l’écu d’argent à trois crapauds de sable, parce que ces animaux sont aquatiques. De-là encore le sobriquet de crapauds-franchots, que les Flamands & les Walons donnent aux François. Favyn, Hist. de Nav. L. VII, p. 399.

On trouve dans la vie de S. Pierre Célestin, crapollus, comme si ce mot venoit de crapol. Voyez Act. SS. Maii, T. IV, p. 423. F.

On dit ironiquement & proverbialement, qu’un homme est chargé d’argent comme un crapaud de plumes ; pour dire, qu’il a peu d’argent. On dit encore, qu’un homme saute comme un crapaud ; pour dire, qu’il n’est pas léger & disposé. On dit