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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/440

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CHANSONNETTE. s. f. Petite chanson, chanson jolie, tendre, amoureuse, pastorale. Cantiuncula.

Chansonnette, se dit par opposition aux airs graves & serieux.

Pour quelques chansonnettes
N’allez pas prendre droit de vous croire Poëtes. Boil.

CHANSONNIER. s. m. Faiseur de chansons. Cantilenarum scriptor, ou cantus modulator. Il y a de deux sortes de Chansonniers. Les uns composent les vers & les airs de leurs chansons ; & les autres se contentent de composer des vers sur les airs que les Musiciens leur donnent. Ce terme n’est que du style familier.

Chansonnier, ère. adj. Propre à faire des chansons. Cantilenis pangendis idoneus. Le génie chansonnier est le partage de la Nation françoise : les Etrangers ne peuvent pas atteindre à cette légèreté & à cette délicatesse qui anime nos chansons. C. De Rior. Un Poëte chansonnier. Id. Le Baron de C. célèbre par son génie chansonnier. Id. Comme adjectif, ce terme n’est pas en usage.

CHANT. s. m. Le chant en général, est l’élévation & l’inflexion de la voix sur différens tons, avec modulation. Cantus. Chant, harmonieux, mélodieux. Chant triste, lugubre. Chant d’alégresse. Chant de triomphe. Chant nuptial. Chant pastoral.

En musique le chant est proprement un air, qui est compose de tons, de demi-tons & de temps, ou de mesures, C’est une modulation de voix qui élève ou qui balise les tons de la prononciation des paroles, en sorte qu’elles rendent un son agréable à l’oreille. Arétin & les anciens divisoient le chant en trois sortes, le chant dural, c’est-à-dire, dur & rude, durus, asper ; le chant naturel qui est entre les deux autres, & qui n’en a point les caractères, naturalis, medius ; & le chant mol, qui est doux, mollis.

Cantus Ambrosianus, est un chant composé de quatre tons authentiques des Anciens, le Dorien, le Phrygien, le Lydien & le Missolydien, que S. Miroclet, Evêque de Milan, ou selon d’autres, S. Ambroise, choisit pour en composer et en former le chant de l’Eglise de Milan. On croit que ces quatre tons furent appelés authentiques, parce qu’ils furent approuvés, autorisés, & choisis pour le chant. Voyez M. de Brossart.

Chant. (Plain) Planus ac simplex canendi modus. Dans l’Histoire Ecclésiastique il est fait mention de plusieurs sortes de chants. Le premier est le chant Ambrosien, le second le chant Grégorien qu’on appelle aussi Plain-chant.

Le chant Ambrosien, est une sorte de plain-chant dont l’invention est attribuée à S. Ambroise.

☞ Le chant Grégorien, est une espèce de plain-chant dont l’invention est attribuée à S. Grégoire Pape, & qui a été substitué dans la plupart des Eglises au chant Ambrosien.

La différence qu’il y a du plain-chant avec les autres chants, c’est d’être divisé en parties égales. Dans les vieux livres d’Eglise, on ne faisoit point de notes plus longues les unes que les autres. Depuis quelques temps on y a mis des notes longues & brèves, mais c’est seulement pour marquer les accens. S. Grégoire le Grand a établi dans l’Eglise Latine cette sorte de plain-chant, qu’on appelle de son nom chant Grégorien. Franchin a marqué tous les caractères différens du chant Grégorien. Dans les répons, dit-il, le chant est véhément, & semble réveiller par des sons rompus ceux qui sont assoupis. Dans les Antiennes, le chant est uni & doux ; dans les Introït, il est élevé, pour exciter à chanter les louanges de Dieu. Dans les Alléluia & ses Versets, il est doux & inspire de la joie ; dans les Traits & dans les Graduels, il est allongé, traînant, modeste, humble ; dans les Offertoires & les Communions, il tient un certain milieu. Jean Diacre se plaint dans la vie de S. Grégoire, de ce que les Germains & les peuples de Gaule avoient changé quelque chose au chant Grégorien, & qu’ils en avoient altéré la douceur : la raison qu’il en apporte, c’est que les voix de tonnerre de ces grands corps sortant de leurs gosiers toujours arrosés de vin avec grand bruit, & par des tons élevés, au lieu de former des sons doux & agréables, représentent l’horrible fracas que font des charettes qui roulent confusément ensemble dans des lieux raboteux comme des dégrés. M. Nivers, dans sa Dissertation sur le chant Grégorien, fait voir qu’il a été souvent altéré & corrompu, & qu’on a souvent tâché de lui rendre sa première beauté ; mais qu’on ne pouvoit empêcher qu’il n’y arrivât des changemens avant l’invention des notes, lesquelles avant Arétin, ne consistoient que dans des points, des virgules, des accens, en quoi il est aisé de se tromper. Il ajoûte qu’ayant examiné & comparé les Antiphonaires & les Graduels manuscrits de la Bibliothèque du Roi, de celle de Saint Germain-des-Prez, & de plusieurs autres, & fait consulter les manuscrits de celle du Vatican, il y a trouvé de grandes différences, & même des contradictions. On imprima à Paris en 1713 ou 1714 un livre intitulé, Moyens certains de perfectionner toutes les méthodes de plain-chant, &c.

Jean Bona, Abbé de l’Ordre de S. Bernard, & connu sous le nom de Cardinal Bona, a fait un traité de la divine Psalmodie, où il comprend tout ce qui regarde le chant de l’Eglise. Il est certain par les exemples de l’Ancien Testament, qu’on a dès les premiers temps employé le chant pour célébrer les louanges de Dieu ; & l’on a toujours conservé cette coutume jusqu’à nos jours, quoique le chant n’ait pas toujours été réglé comme il l’est aujourd’hui, & que les persécutions n’aient pas toujours permis de l’employer.

L’usage du chant à deux chœurs, le peuple mêlant sa voix à celle du Clergé, est ancien : Grégoire de Tours en parle, Lib de Glor. Conf. c. 47, quoiqu’à parler exactement, ce fut bien moins un chant les trois ou quatre premiers siècles, qu’une prononciation plus pathétique & plus ferme. S. Grégoire Pape, qui savoit la Musique, corrigea le chant ancien ; le chant réformé s’établit aussi-tôt dans les Eglises d’Italie. Le Gendre. Pepin, pour mettre de l’uniformité dans les Eglises de France, & en signe de l’union, de la concorde qu’il vouloit que ces Eglises eussent avec l’Eglise de Rome, avoit ordonné qu’on établît dans tous les Monastères & dans toutes les Eglises le chant Grégorien, c’est-à-dire, le chant Romain, réformé selon la méthode du Pape S. Grégoire le Grand. Le Clergé avoit eu peine à obéir à cet ordre, & on ne l’observoit pas dans quantité d’Eglises ; on y étoit jaloux des anciennes coutumes, & on s’y piquoit de chanter aussi-bien qu’à Rome. Dans le voyage que Charlemagne fit à Rome en 787, il fut témoin de cette jalousie ; car pendant les fêtes de Pâque, les Chantres de sa Chapelle ayant assisté au service de l’Eglise de Rome, se moquèrent des Chantres Romains ; & ceux-ci ayant entendu chanter ceux du Roi, en raillèrent à leur tour. Charlemagne prit cette occasion pour les engager à un défi, & s’étant fait le Juge du combat, il prononça en faveur des Romains. Il obtint du Pape des Antiphonaires notés à la manière Grégorienne, & deux Maîtres de chant : il en établit un à Mets, & l’autre à Soissons, pour y tenir des Ecoles, où l’on apprît à chanter, & où l’on corrigeât tous les livres d’Eglise. P. Dan. Tom. I, p. 47. Quelques Eglises ne prirent qu’une patrie de ce chant Grégorien, & le mêlèrent avec le leur. Ce chant mi-parti de Grégorien & de François demeura en beaucoup d’Eglises, & on continua de s’en servir pour les Pseaumes & pour les Antiennes, depuis même qu’il y eut musique. Le Gendre.

Chant égal, ou chant en ison. Chant qui ne roule que sur deux sons, & ne forme par consé-