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Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, II.djvu/722

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joints à l’Ordre de S. Lazare. ☞ Les Commanderies sont des biens affectés pour l’entretien du Chevalier & pour le service de l’Ordre. De quelque nature que soit une Commanderie, on ne peut la résigner.

On peut comparer les Commanderies aux Prieurés conventuels des Moines, qui n’étoient dans les commencemens que les administrations du revenu de certains lieux éloignés du principal Monastere. Comme l’on mettoit des Moines dans ces maisons pour avoir soin du bien, de même l’on a été obligé d’envoyer les Chevaliers dans les lieux où l’Ordre avoit des terres. Les Commanderies de Malte ne peuvent être possédées que par les Religieux de cet Ordre, auxquels elles sont affectées. Leurs Bénéfices ne sont pas tous de même nature ; car comme il y a parmi aux des Chevaliers, des Chapelains & des Freres servans, il y a aussi des Commanderies, ou revenus attachés à ces trois différentes qualités. Comme les Commanderies ne sont point des Bénéfices, le Pape ne peut ni les donner, ni les ôter.

COMMANDEUR. s. m. Chevalier qui est pourvu d’une de ces Commanderies. Eques beneficio ordinis præditus, Commendator. Le nom de Commandeur a du rapport avec celui de præpositus, qu’on donnoit aux Moines qui étoient préposés pour garder les maisons ou fermes éloignées du principal Monastère ; leur administration s’appeloit obedienta, parce qu’il dépendoient entièrement de l’Abbé, qui leur donnoit cette commission. Il en est de même des simples Commandeurs de Malte, qui sont plutôt des Fermiers de l’Ordre, que des Bénéficiers. Ils ont néanmoins converti leur commissions, ou Fermes, en une espèce de Bénéfices, en donnant un certain tribut au trésor commun de l’Ordre, & ils appellent ce tribut Responsion. Il y a dans cet Ordre plusieurs grands Officiers, dont le premier est celui qu’on nomme présentement le Grand Maître de l’Ordre, & qui en est le Chef. Sous lui sont plusieurs grands Officiers qui sont la plûpart des Officiers militaires. Il y a aussi des Baillis, ou Prieurs conventuels, qui sont de la grande Croix, & plusieurs autres Officiers.

Commandeur, ou Grand-Commandeur. s. m. C’est la première dignité de l’Ordre de Malte après le grand-Maître. Il est toujours de la Langue de Provence, comme la première de la Religion. Le Grand-Commandeur est le Président né du commun trésor & de la Chambre des Comptes. Il a la surintendance des magazins, de l’arsenal & de l’artillerie. Il en nomme les Officiers, qu’il fait agréer par le Grand-Maître & le Conseil. Son autorité s’étend jusques dans l’Eglise de S. Jean, dont il nomme plusieurs Officiers. Il a le même droit à l’Infirmerie. Le Grand-Commandeur doit faire sa résidence à Malte, dans le Couvent, d’où il ne peut sortir pendant qu’il est en place. L’Ab. de Vertot.

Commandeur du grenier à Malte, est un Officier de la Religion qui est chargé de la conservation des grains, & autres munitions de bouche. Il a sous lui des Prudhommes qui sont ses surveillans. On les appelle les Prodhommes de la petite Commanderie.

Pour être Commandeur de Malte, il faut être de la nation où est située la Commanderie, avoir fait ses caravanes, qui consistent en un service de quelques années à Malte, & être de la qualité requise par la Commanderie : & de plus il sont liés par de certains statuts, auxquels néanmoins on déroge souvent à la recommandation des Princes, qui ont même fait des concordats pour cela avec l’Ordre de Malte.

Il y a une autre sorte de Commandeurs, ou Chevaliers, qui jouissent des bien Ecclésiastiques sans être ni Religieux, ni Ecclésiastiques, parce qu’ils sont mariés ; ils se disent Religieux, & ont des reglemens comme les autres Religieux. En Espagne les Commandeurs des Ordres de S. Jacques, de Calatrava & d’Alcantara sont de ce nombre. En France les Chevaliers de S. Lazare peuvent aussi se marier. Etant Religieux de profession, ils devroient être obligés à garder la chasteté ; mais le Pape, qui, selon les maximes du droit nouveau, est le maître des Canons, les a dispensés de cette obligation : ils peuvent avoir des femmes par un privilège du Saint Siege. C’est par de semblables privilèges obtenus des Papes, que les Rois d’Espagne sont grands Maîtres des trois Ordres militaires de leur Royaume, savoir, de S. Jacques, de Calatrava & d’Alcantara. Martin Navarrus appelle Philippe II, le plus grand Prélat de l’Eglise, après le Pape, parce qu’il étoit le grand Maître de ces trois Ordres, & qu’il jouissoit d’une bonne partie des dixmes des Eglises qui sont dans ses Etats.

Commandeur est aussi un Prélat, un Ecclésiastique qui est agrégé par honneur dans les Ordres des Chevaliers, comme dans l’Ordre des Chevaliers du S. Esprit. Ordinis Sancti Spiritûs Commendator. Il y a plusieurs Prélats Commandeurs.

Les Commandeurs de l’Ordre du S. Esprit sont de purs titres, auxquels n’est attachée aucune Commanderie. Henri III ayant institué cet Ordre, fit ce qu’il put pour obtenir du Pape que les revenus des plus riches bénéfices du Royaume fussent attribués à ces Commanderies, qui n’étoient que de nom. Mais il n’obtint rien de la Cour de Rome ensorte que les Commandeurs de l’Ordre du S. Esprit ne sont que des Commandeurs titulaires. Dans l’Ordre de S. Antoine on donnoit anciennement le nom de Commandeur au supérieur de la Maison.

Commandeur. Les Religieux de la Merci & des Mathurins donnent ce nom aux Supérieurs de leurs Maisons ou Couvents. Commendator.

Commandeur chez les Hollandois, ☞ est un titre qu’ils donnent aux Chefs des comptoirs qu’ils ont établis pour leur commerce dans les Indes Orientales.

Commandeur. On appelle ainsi dans les Îles Françoises de l’Amérique, celui qui a inspection sur le détail d’une habitation en général, ou d’une sucrerie en particulier.

COMMANDITAIRE, s. m. Celui qui a une Commandite.

COMMANDITE, s. f. terme de Commerce. Espèce de société qui se fait entre Marchands, dont l’un ne fait que de préter son argent sans faire aucune fonction d’associé, & l’autre donne ses soins. Inita cum quibusdam solius pecuniæ mutuæ beneficio societas. Toute société, soit générale, soit en commandite, doit être par écrit, & l’extrait en doit être enregistré au Greffe de la Juridiction Consulaire. Les associés en commandite ne sont obligés que jusqu’à la concurrence de leur part, selon l’Ordonnance de 1673. En vieux termes de Coutumes on appeloit command, la charge qu’on donnoit d’acheter ou de négocier quelques chose, Commissa rei gerendæ potestas ; & on disoit aussi, prendre en charge & command ; pour dire, recevoir en dépôt. Voyez Command.

☞ COMMANDO, s. f. terme italien, usité dans quelques-unes de nos Provinces, voisines de l’Italie, ordre ou commission qu’un Négociant donne à son Correspondant ou Commissionnaire.

☞ COMMANI. Petit Royaume d’Afrique, dans la Guinée, sur la côte d’Or. Les Etats de ce Souverain n’ont pas plus d’étendue qu’une de nos fermes ; son palais est une chaumière dans un village nommé le Grand Commani.

COMMANT. Vieux mot ou particule, qui se disoit en cette phrase : A Dieu commant, c’est comme qui diroit aujourd’hui, à Dieu vous dis', pour marquer qu’une chose est perdue ou désespérée. Je crois que cela vient par corruption de à Dieu commande, c’est-à-dire, à Dieu je la recommande, Deo commendo. Elle m’échappe, elle est perdu ; qu’elle soit à la garde de Dieu, je la lui recommande.

Crainte d’oubli pourtant au cueur me poinct,
Combien qu’il ait la mémoire excellente ;
Et n’ai pas tout ; car si je perds ce point,
A Dieu commant le plus beau de ma rente. Marot.