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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/172

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Frotter, v. trans. Passer une chose sur une autre en appuyant. C’est en frottant la corde tendue que l’archet la met en vibration. On classe parfois sous la dénomination générale d’instruments à cordes frottées les instruments à archet, par opposition aux instruments à cordes pincées ou frappées.

Frottole, n. f. Ancienne forme de composition vocale profane, à la mode vers la fin du xve s. et le commencement du xvie s., en Italie où elle précéda le madrigal. On l’écrivait à 3 ou 4 voix sur de petites poésies en vers octosyllabiques, disposées en couplets de 4, 6 ou 8 vers à « rime plane » c’est-à-dire portant l’accent sur l’avant-dernière syllabe, avec refrain. Les sujets sont de genre érotique ou satirique, rarement grave, souvent grossier. Par une disposition nouvelle à cette époque, et qui a fait croire à l’origine populaire de la F., la mélodie est placée, non au ténor, comme l’exigeait alors l’art contrepointique, mais à la voix supérieure. En même temps, une grande simplicité dans la conduite des parties rendait son exécution facile à toutes les catégories de chanteurs. L’imprimeur Petrucci a publié, dans les premières années du xvie s., dix recueils de F., dont neuf ont été conservés et ne contiennent pas moins de 579 morceaux de 36 compositeurs italiens, dont les plus fréquemment représentés sont Marco Cara, Bartolomeo Tromboncino, Philippe de Lurano, Antonio Capreoli et Micha.

Frottoliste, n. m. Compositeur de frottoles.

Fugara, n. f. Jeu d’orgue de 8 et de 4 pieds, de la famille des jeux de gambe.

Fugato, n. m. Passage en style fugué dans une composition qui n’est pas rigoureusement astreinte à ce style.

Fughetta, n. f. ital., diminutif de fuga. Petite fugue.

Fugue, n. f. étym. lat. et ital., fuga = fuite. Forme de composition à plusieurs parties, entièrement basée sur le principe de l’imitation et dans laquelle un thème principal, ou sujet, et un ou plusieurs thèmes secondaires, ou contre-sujets, semblent fuir sans cesse de voix en voix. La F. est issue du canon, qui portait en effet, à l’origine, le titre de fuga, et qui, par le résultat d’une longue préparation historique à laquelle ont surtout efficacement contribué les grands organistes du xviie s., a été transformé et organisé en un style plus riche, dont l’austérité même est un élément de beauté et qui comporte, sous la rigueur d’un plan général à peu près immuable, des possibilités d’invention illimitées. En Jean-Sébastien Bach (1685-1750), se personnifie pour ainsi dire le genre de la F., qu’il a porté à ses limites de puissance et dont il a adapté les expressions, comme sa langue naturelle, à toutes ses œuvres. Partout il s’est servi de la F. et de ses procédés techniques « comme d’une forme vivante, d’un langage plus sévèrement écrit, mais d’où le mécanisme du style n’a pas banni les pensées » (Pirro). Dans les deux dernières années de sa vie, il sembla vouloir léguer à ses successeurs les secrets de sa science, en rédigeant l’ouvrage fameux intitulé L’Art de la F., qui contient 13 F. et 4 canons construits sur un thème unique, développé, transformé et combiné avec des thèmes secondaires :


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La dernière F. est inachevée ; Bach y travaillait lorsqu’il fut atteint de la cataracte et perdit la vue, peu de mois avant de mourir. Il en a été de ce morceau comme des marbres antiques mutilés, pour lesquels la meilleure des restaurations demeure en fin de compte une profanation ; impuissants à le terminer, plusieurs musiciens allemands ont voulu le croire étranger à l’ouvrage auquel il se trouvait joint ; mais le manuscrit autographe a prouvé qu’il appartenait bien à L’Art de la F. Après J.-S. Bach et de son vivant même, l’abus fait par des compositeurs sans talent des formes où s’était révélé son génie rendit souvent la F. vide et insupportable ; en 1785, elle était pour Niedt un objet « d’ennui et de dégoût » ; les philosophes français, J.-J. Rousseau, Chabanon, etc., restaient absolument fermés à sa compréhension, et leurs vues se perpétuaient, en France, jusqu’en Berlioz, qui la tournait en dérision dans ses partitions de La Damnation de Faust (1848), de Béatrice et Bénédict (1862), et dans plus d’une page de ses écrits. Enseignée constamment dans les Conservatoires, la F. n’était alors envisagée que comme un exercice d’école et, tout au plus, comme une forme conventionnelle, froide et pédante, admissible dans le