Aller au contenu

Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/325

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

vement des parties et à la limitation du nombre des intervalles admis qui dans le petit traité en langue vulgaire publié par de Coussemaker sont uniquement la quinte et l’octave. « quins et double ». Mais le déchant était souvent improvisé. On peut définir le déchant comme une forme rudimentaire d’harmonie à 2 voix pratiquée, dès les xie-xiie s., soit par écrit, soit alla mente, par l’improvisation d’un chanteur qui ajoute, en se conformant à certaines règles, une seconde partie, à la mélodie notée sur le livre et interprétée par le chantre ou par le chœur à l’unisson. Cet art se bornait, dans le commencement, à l’usage de la quinte et de l’octave, employées autant que possible alternativement et en mouvement contraire, note contre note, les pauses restant égales dans les deux voix. Mais bientôt furent admis d’autres intervalles. Le ive Anonyme de Coussemaker connaît deux manières de pratiquer le déchant, l’une selon les « proportions voisines », c’est-à-dire à la quarte et à la quinte, l’autre selon les « proportions éloignées » ; le principe du mouvement contraire y fut maintenu sans que l’on s’occupât d’éviter les croisements. Vers la même époque, Jérôme de Moravie (environ 1270) embrassait sous le titre général de déchant (discantus) toutes les formes de la composition harmonique, savoir le simple déchant, l’organum « purum » et le « duplex », le conduit, le motet et le hoquet. Le simple déchant consistait en successions de quintes, octaves et douzièmes (quintes redoublées), ajoutées au chant donné, ou plain-chant, sous la condition que les pauses, dans les deux parties, seraient semblables, et les notes différentes. Les historiens modernes réunissent, à cet exemple, les diverses catégories de composition harmoniques, dont les progrès s’accomplissent parallèlement à ceux de la notation, dans le xiie et le xiiie s., et eurent la France pour foyer. Déjà dans les manuscrits du xiie s. à ses débuts, on possède près de 150 pièces harmoniques, dont 60 environ sont des organums. L’organum purum était la forme primordiale du chant artistique à 2 voix. Walter Odington (vers 1250-1340) le décrit comme formé d’un ténor de un, 2 ou 3 sons emprunté au plain-chant et tenu en longues notes, avec des tremolos pour adoucir la rencontre des dissonances ; et au-dessus de ce ténor une voix commençant à l’octave, à la quinte ou à la quarte et finissant à l’octave, la quinte ou l’unisson, mais déroulant (d’après l’ex. noté) un chant « coloré », c’est-à-dire orné. Cette forme tenait le milieu entre le plain-chant et la mélodie mesurée, et cherchait à en opérer la fusion. La traduction en notation moderne des ex. de W. Odington est une opération très délicate. G. Adler a offert trois traductions de l’ex. qui accompagne la définition ci-dessus. La 2e traduction est la plus conforme aux définitions du théoricien ; la fioriture seule y est librement rythmée. En voici la 1re période :


\language "italiano"
global = { \time 6/4 \key fa \major }
hautMusic = \relative do' {
  \override Staff.Clef.color = #white
  \override Staff.Clef.layer = #-1
  \clef "treble"
  \override TupletBracket #'bracket-visibility = ##f
  do1 re2 \bar ";" mi fa2 \tupletDown \tuplet 3/2 { fa4( mi2) } \bar ";" fa2 re1 \bar ";" sib1. \bar ";" la2 sib do \bar ";" sol1._\markup { \lower # 2.5 { \hspace #4 { \italic "etc." }}} \bar ""
}
basMusic = \relative do {
  \clef "bass"
  \override Staff.BarLine.color = #white
  \override Staff.BarLine.layer = #-1
  fa1.  fa  fa  fa  r  sol
}
\score {
  <<  
    \new ChoirStaff <<
      \new Staff = "sopranos"
      <<
        \new Voice = "sopranos" {
          \global
          \hautMusic
        }
      >>
      \new Staff = "altos"
      <<
        \new Voice = "altos" {
          \global
          \basMusic
        }
      >>
    >>  % end ChoirStaff
  >>
    \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    indent = 0\cm
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
  }
  \midi { }
}
\header { tagline = ##f}

Maître Léonin, auteur du premier recueil d’organa chantés à la cathédrale de Paris, dirigeait le chœur de cette église au xiie s. Son successeur, maître Pérotin, qui fut surnommé « le Grand », composa des morceaux à 3 et à 4 voix. Robert de Sabilon et Jean de Garlande, qui marchèrent à sa suite, habitaient Paris. Le déchant, en y comprenant toutes les branches de l’art harmonique à ses débuts, est un produit du génie français. La réalisation définitive d’un « organum purum » écrit se trouve condensée dans les deux exemples suivants, que nous empruntons à A. Gastoué :

Déchant : [Le rythme de cette pièce est incertain]

\language "italiano"
global = { \key fa \major }
hautMusic = \relative do'' {
  \clef "treble"
  \cadenzaOn
  \override TupletBracket #'bracket-visibility = ##f
  fa8[ mi] re[ do] la[ sol] fa4( la) fa( sol) \tupletDown \tuplet 3/2 { la( sol fa) } fa do'2 \bar"|" \break
  \override Score.Clef.break-visibility = ##(#f #f #f)
  \override Score.KeySignature.break-visibility = ##(#f #f #f)
  mib4 do re sib do mib! do2_\markup { \lower #4 { \hspace #5 { \raise #1.5 { \italic "etc.  " }}}} \bar ","
}
hautWords = \lyricmode {
  Vi -- \skip 1 de -- \skip 1 runt \skip 1 Em -- ma -- \skip 1 nu -- el
  Pa -- tris U -- ni -- ge -- ni -- tum
}
basMusic = \relative do {
  \clef "bass"
  fa4^\markup { \hspace #-4 { \italic "Chant" }} fa la si( do) re( si) do( la) si do2  \bar "," \break
  do4 la si sol fa mib fa2 \bar "||"
}
\score {
  <<  
    \new PianoStaff <<
      \new Staff = "sopranos"
      <<
        \new Voice = "sopranos" {
          \global
          \hautMusic
        }
      >>
      \new Lyrics \lyricsto "sopranos" {
        \hautWords
      }
      \new Staff = "altos"
      <<
        \new Voice = "altos" {
           \basMusic
        }
      >>
    >>  % end PianoStaff
  >>
    \layout {
    \context { \Staff \RemoveEmptyStaves 
                      \remove Time_signature_engraver
    }
    indent = 0\cm
    \override Score.BarNumber #'stencil = ##f
    line-width = #120
    ragged-last = ##t
  }
  \midi { }
}
\header { tagline = ##f}
(École limousine, xi-xiie s.)
(Voir page suivante.)