surchargeant de la « grande quantité de traits brillants que lui fournit sa tête ». Il ne regardait la musique notée que comme « un canevas » et mécontentait souvent les compositeurs en éblouissant le public. La manie d’orner défigurait tout. Nous admirons la pureté de la ligne mélodique d’un Adagio de Tartini et nous applaudissons le violoniste qui en fait chanter la mélodie. J.-B. Cartier (1798) enseignait 6 manières de le broder, qui le rendaient méconnaissable.
Mme de Mongeroult
(vers 1800) en usait de même au piano,
en enseignant 4 manières de surcharger.
C’est encore ainsi que procédait
Mme Pleyel qui publiait un Andante
de Hummel enguirlandé de traits de
sa façon. On attribuait un sens expressif
aux ornements. Chr. Simpson, en
1659, déclare que certains ornements
(il en a donné une table de 13) sont
plutôt rudes et masculins et conviennent
particulièrement à la basse,
notamment ceux de forme simple,
l’appogiature montante ou descendante ;
d’autres sont féminins et
convenables aux parties supérieures,
notamment le vibrato et les ornements
compliqués. Ceux-ci conviennent à
l’expression de l’amour, de la pitié ;
les premiers, à celle du courage, de
l’ardeur. Dans le même ordre d’idées,
Geminiani (A Treatise of good Taste,
1759) dit que l’appogiature supérieure
passe pour exprimer l’amour, l’affection,
le plaisir ; selon la manière
dont on exécute un trille, il exprime
la fureur, la résolution, ou bien l’horreur,
la plainte, ou l’affection, le
plaisir, etc., ou encore la majesté, la
dignité, etc. C’est pour obvier à de
telles complications, que les maîtres
commencèrent de bonne heure, à indiquer
les ornements dont ils entendaient
qu’on se servît. Mais les signes
de notation employés pour marquer
la place et la nature des ornements
varient selon les époques, les lieux, et
les auteurs. Dès le xviie s., leur nombre
et leurs acceptions diverses obligeaient
les compositeurs aussi bien que les
théoriciens à rédiger des tables explicatives,
qu’ils plaçaient en tête de leurs
pièces ou de leurs traités. Comparées
l’une à l’autre, ces tables se contredisent
très souvent. Il est donc impossible
de désigner une fois pour toutes
le sens de chaque signe d’ornement
et l’on doit au contraire avoir égard
pour leur interprétation aux explications
qui en ont été données à
l’époque par l’auteur lui-même ou par
un musicien de son école. Il suffit de
dire que le trait oblique incliné, /, simple
ou double, dirigé en montant vers
la droite ou vers la gauche, exprime
à la même époque chez les auteurs
différents tantôt l’appogiature ascendante
ou descendante, tantôt l’arpeggio,
tantôt le mordent supérieur ou
inférieur, tantôt un trille court, avec
et sans terminaison en grupetto, tantôt
enfin, comme à l’époque moderne, le
vibrato, tremolo, ou répétition rapide
d’une même note. Il est donc impossible
de dresser un code absolu de
l’exécution des ornements dans la
musique ancienne, qui dispenserait les
exécutants modernes des études nécessaires
pour interpréter les signes selon
leur signification temporaire et locale.
Chaque signe d’ornement, dans les
manuscrits ou les éditions anciennes,
doit être étudié et traduit en conformité
avec les indications de l’auteur, si
on les possède, ou de ses contemporains
et compatriotes.
L’écriture par signes avait l’avantage d’abréger la notation :
Traduction :
Bach a lui-même rédigé en 1720 pour son fils Wilh.-Friedemann une table des signes d’ornements qu’il avait coutume d’employer, et auxquels il conservait des noms italiens et français. Ces signes sont au nombre de 13. On en a relevé d’autres dans les mss et les anciennes éditions de ses œuvres. On s’appuie pour leur explication sur les cas où Bach lui--