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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/357

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nous ravir, aujourd’hui encore » (T. de Wyzewa). À la même époque l’excellent maître de chapelle de la cathédrale de Strasbourg, Ignace Pleyel, dont le poste était supprimé par la Révolution, vint à Paris, attiré peut-être par Séb. Érard (1795), et, après avoir fondé tout d’abord un magasin de musique, se livra, à partir de 1805-1807, à la facture du piano.


Piano droit.


I. Pleyel apporte à la construction de cet instrument des perfectionnements en partie personnels, en partie empruntés à l’Anglais Broadwood. En 1810, il fait annoncer son piano à tambourin, dans lequel une pédale frappe une membrane avec ou sans grelots ; on assurait alors qu’ « on ne peut se faire une idée du charme que cette addition prête au piano ». Mais c’est Érard, en 1822, qui atteignit le point de perfection de la facture, par l’invention du mécanisme « à double échappement » qu’il cherchait depuis plus de quarante ans. Dès lors, les factures de Pleyel et d’Érard rivalisèrent, et les maisons de ce nom constituent encore les premières marques du monde. || Dans la fabrication d’un piano moderne, entrent plusieurs bois différents : chêne, hêtre, sapin, noyer d’Amérique, pour le châssis sur lequel sont tendues les cordes ; poirier, cormier, charme, érable, pour la mécanique ; tilleul, pour le clavier ; bois exotiques, pour l’ébénisterie ; plusieurs métaux : acier coulé pour le cadre d’une seule pièce qui est l’ossature du piano, fer forgé ou acier pour les barrages, fil d’acier entouré d’un fil de cuivre enroulé pour les grosses cordes, etc. ; plus ébène, ivoire, pour les touches, peau de buffle, drap, pour la mécanique. La tension de toutes les cordes réunies d’un piano peut atteindre une force de 24 tonnes. La justesse du son et la qualité de son timbre dépendent de la tension de la corde et de la distance où le marteau vient la frapper. La qualité du toucher se fait sentir grâce à la sensibilité que donne à la mécanique le système du double échappement. C’est après 1870 que des ouvriers allemands, employés dans les manufactures françaises, transportèrent en Allemagne et en Amérique les secrets d’Érard et de Pleyel, et c’est de cette époque seulement que date la renommée de la facture de piano allemande et américaine. || Le piano, dérivé du clavicorde, influa à son tour sur celui-ci : vers 1720, on construisit des clavicordes « indépendants », à une corde par touche ; on leur appliqua ensuite le système des étouffoirs. Mais cela ne suffit pas à sauver le vieil instrument. D’autre part, c’est, dit-on, à l’épinette, que le piano aurait emprunté la pédale de sourdine, dont on fait honneur au facteur Pietro Prosperi, de Sienne, vers 1700. Mais il ne semble pas qu’elle ait été d’un emploi courant. C’est elle sans doute qui forme la caractéristique des clavecins « célestes » de Southwell, en 1779, et on la retrouve sous le même vocable dans les pianos, vers 1830. La pédale senza sordini, qui lève les étouffoirs, n’apparaît pas dans les partitions d’œuvres de piano avant l’op. 40 de Clementi (1795), dans le finale, en pp, et encore

(D’Indy, Sonate, op. 63, 1er morceau.)