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Page:Dictionnaire pratique et historique de la musique.pdf/482

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éclisses sans les dépasser ; ses filets suivant les contours des tables ; cheviller en forme de crosse, légèrement recourbé en arrière, et souvent terminé par une tête sculptée ; un cordier ; pour les violes anciennes, des divisions sur le manche, faites de cordes de boyau enroulées, formant sept cases. Les grandes violes anciennes ont avec les ouïes une rosace découpée à jour vers l’extrémité de la touche.

L’époque de transition entre la vièle et la viole fournit des modèles très variés, dont on suit le développement sur les monuments figurés.

Il n’y avait aucune fixité ni dans le patron ni dans l’accord des instruments de la famille des violes, au xvie s. Les deux éditions successives du livre d’Agricola donnent un accord différent pour la 3e corde (en descendant) du dessus et du ténor de viole, et la 1re attribue 4 cordes à la basse de viole, tandis que la 2e lui en donne 5. Les figures des ouvrages de Virdung et d’Agricola (1511 et 1545) offrent outre les violes ordinaires, à échancrures, à cases sur le manche, une autre espèce de petites violes à dos bombé, sans échancrures et sans cases sur le manche, avec un chevalet abaissé de chaque côté, et 3 cordes. Agricola présente toute une famille de ces instruments où l’on peut reconnaître la gigue et le rebec. La figure de viole à 5 cordes que Mersenne a donnée dans l’Harmonie universelle, et qui a été maintes fois reproduite, représente, comme le dit le texte, une viole ancienne, du xvie s., dont on ne possède plus d’exemplaire réel. La viola da braccio des Noces de Cana de Paul Véronèse est à 5 cordes. Ce tableau célèbre présente la composition d’un quatuor à cordes vers 1563 : deux joueurs de ténor de viole (viola da braccio), un autre de contre-basse de viole, un jeune garçon assis épaulant une violetta ou soprano de viole, équivalent du violon. Les 2 grandes violes sont de belle forme et bien montées selon la Regola Rabertina de Ganassi del Fontego (1543). Dans l’orchestre de l’Orfeo de Monteverde, (1608) il y avait 2 contre-basses de viole, 3 viole di gamba, et 10 viole da braccio. « Les violes sont grandement propres pour les concerts, écrit Pierre Trichet (vers 1635). Après les voix humaines excellentes, il n’est rien de si charmant que les mignards tremblements qui se font sur la manche et rien de ravissant que les coups mourants de l’archet. » La sonorité des violes était douce et pleine de charme, mais peu timbrée et peu énergique. Cela tenait à la hauteur des éclisses trop élevées par rapport à la grandeur de la caisse et aussi au poids des nombreuses cordes. Cette sonorité douce et voilée convenait à la musique de chambre et à l’accompagnement tels qu’on les pratiquait au xviie s. La famille des violes subsista longtemps après l’adoption du violon. De tous ses modèles, ce fut la basse de viole qui disparut la dernière. Pardessus de viole, appelé aussi quinton : les luthiers français du xviiie s. ont construit beaucoup de ces instruments dont le son est dur et sec, et qui n’ont presque pas été joués. Un pardessus de viole de L. Guersan, 1768, a la table voûtée légèrement, le fond est plat, coupé en sifflet vers le manche. Il y a 5 cordes. La longueur totale est 620 mm., celle de la caisse 320 mm., la plus grande largeur de la caisse 195 mm. La sonorité « sèche et pointue » du pardessus de viole tient à ce que les éclisses y sont démesurément hautes. Le pardessus de viole se tenait debout entre les genoux. L’auteur des Observations sur la musique (1757) s’étonnait de l’opinion des familles bourgeoises qui choisissaient cet instrument pour leurs filles et trouvaient « moins honnête » le violon, tenu à l’épaule. Mlle Lévi était alors renommée pour son exécution et son talent de bien enseigner le pardessus de viole. Viola di gamba = basse de viole. La basse de viole figurée dans le tableau de Domenico Zampieri (le Dominiquin), Sainte Cécile (Musée du Louvre), est une très belle viola di gamba, avec cheviller pour 7 cordes, terminé par une tête d’ange, petite « rosace borgne » au bout de la touche. La sainte tient l’archet ainsi qu’il est recommandé par Jean Rousseau dans son Traité de la viole (1687). La basse de viole était à peu près de la dimension du violoncelle, montée de cordes de boyau. En 1636, Mersenne ne connaît pas encore de viole ayant plus de 6 cordes et ne parle pas de cordes filées. C’est vers 1675, que Sainte-Colombe, au dire de Jean Rousseau (Traité de la viole, 1687), son élève, ajouta la 7e corde et introduisit en France l’usage des cordes filées d’argent. Une estampe de 1675 confirme la présence de la 7e corde. Le Tout-Paris du siècle de Louis XIV se donnait rendez-vous en 1680, dit Le Mercure galant, pour entendre un concert fort extraordinaire et le premier qu’on eust jamais fait de cette sorte », composé d’un trio de basses de viole. Au xviiie s., la basse de viole survivait seule à sa famille, et les textes, en la mentionnant, se contentent de