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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, VII.djvu/87

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III ====


Rosalie, Justine, Clairville, Dorval.


Clairville : Venez, mon ami. Venez. Cette Rosalie, autrefois si sensible, maintenant si cruelle, vous accuse sans sujet, et me condamne à un désespoir sans fin; moi, qui mourrai plutôt que de lui causer la peine la plus légère.


Cela dit, il cache ses larmes, il s'éloigne, et il va se mettre sur un canapé au fond du filon dans l'attitude d'un homme désolé.


Dorval Montrant Clairville à Rosalie, lui dit :

Mademoiselle, considérez votre ouvrage et le mien. Est-ce là le sort qu'il devrait attendre de nous? Un désespoir funeste sera donc le fruit amer de mon amitié et de votre tendresse, et nous le laisserons périr ainsi ! ( Clairville se lève, et s'en va comme un homme qui erre. Rosalie le fuit des yeux; et Dorval après avoir un peu rêvé, continue d'un ton bas, sans regarder Rosalie : ) S'il s'afflige, c'est du moins sans contrainte. Son âme honnête peut montrer toute sa douleur Et nous, honteux de nos sentiments, nous n'osons les confier à personne; nous nous les cachons. Dorval et Rosalie, contents d'échapper aux soupçons, sont peut-être assez vils pour s'en applaudir en secret. ( Il se tourne subitement vers Rosalie. ) Ah! Mademoiselle, sommes-nous faits pour tant d'humiliation? Voudrons-nous plus longtemps d'une vie aussi abjecte? Pour moi, je ne pourrais me souffrir parmi les hommes, s'il y avait, sur tout l'espace qu'ils habitent, un seul endroit où j'eusse mérité le mépris, Échappé au danger, je viens à votre secours. Il faut que je vous replace au rang où je vous ai trouvée, ou que je meure de regret. ( II s'arrête un peu , puis il dit : ) Rosalie, répondez-moi. La vertu a-t-elle pour vous quelque prix? L'aimez-vous encore?

Rosalie : Elle m'est plus chère que la vie.

Dorval : Je vais donc vous parler du seul moyen de tous réconcilier avec vous, d'être digne de la société dans laquelle vous vivez,