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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XIX.djvu/34

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à Grimm très-amèrement de mon silence. Il dit qu’il est au moins de la politesse de remercier son avocat[1]. Et qui diable l’a prié de plaider ma cause ? Il a, dit-il, ressenti la plus vive douleur, chère amie ; on ne saurait arracher un cheveu à cet homme, sans lui faire jeter les hauts cris. À soixante ans passés, il est auteur, et auteur célèbre, et il n’est pas encore fait à la peine. Il ne s’y fera jamais. L’avenir ne le corrigera point. Il espérera le bonheur jusqu’au moment où la vie lui échappera.

Non, je ne sais pas qui est l’auteur de la Confession. Oui, je suis dans la grande ville, et si je n’avais pas eu cent fois plus de force qu’Adam le jour que la pomme fatale lui fut présentée, je serais parti pour la Chevrette ; j’y étais appelé par un billet doux, et par un billet très-doux ; car il y en avait deux.

L’enfant, à qui la mauvaise santé ne peut ôter ni la sérénité ni la sensibilité, me jeta ses petits bras autour du cou, et m’embrassa, en disant : « C’est mon papa, c’est mon petit papa. » Je passai dans mon cabinet où je trouvai une pile de lettres. Je les lus. On servit, et nous nous mîmes à table.

Mes collègues n’ont presque rien fait. Je ne sais plus quand je sortirai de cette galère. Si j’en crois le chevalier de Jaucourt, son projet est de m’y tenir encore un an. Cet homme est depuis six à sept ans au centre de six à sept secrétaires, lisant, dictant, travaillant treize à quatorze heures par jour, et cette position-là ne l’a pas encore ennuyé.

Je n’ai rien outré à la peinture de la maladie du père Hoop. Il a été sur le point de secouer le fardeau. Quand je lui demandai ce qu’il estimait le plus de la vie, il me répondit : « Premièrement de n’y être pas, secondement de se bien porter ; vous voyez combien je suis chanceux ; j’y suis et je me porte mal. » À vous parler vrai, je ne compte pas qu’il finisse naturellement.

Vous auriez fait une belle chose sans les contre-seings. Les endroits de mes lettres où je vous dis que je vous aime sont

  1. Cette lettre de Voltaire ne se trouve pas dans sa Correspondance.