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Page:Diderot - Œuvres complètes, éd. Assézat, XVIII.djvu/67

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à notre culte, à nos usages. Quant aux autres, permettez que je renvoie mon avis à quelques lignes plus bas, où je vous parlerai des permissions tacites.

J’ai entendu dire : « Mais puisqu’on ne peut empêcher l’étranger de nous contrefaire, pourquoi ne pas autoriser le régnicole ? Volés pour volés, il vaut encore mieux que nos propriétaires le soient par un Français leur voisin, que par un Hollandais. »

Non, monsieur, cela ne vaut pas mieux ; par quelque considération que ce soit, il ne faut encourager, au mépris des mœurs et des lois, les concitoyens à se piller les uns les autres. Mais encore une fois, faites de votre mieux par l’exécution stricte des règlements pour fermer l’entrée à toute contrefaçon étrangère. Que le Hollandais, le Genevois ou l’Avignonnais perde plus par la saisie d’une édition interceptée qu’il ne peut gagner sur dix qui passeront en fraude. Multipliez ses hasards comme vous le devez, soutenez votre légitime commerçant de toute votre autorité et abandonnez le reste à sa vigilance et à son industrie. Aussitôt que son édition sera prête à paraître, ne doutez pas que ses correspondants n’en soient informés aux deux extrémités du royaume ; que la plus grande partie de son édition ne soit placée ; que ce correspondant, pressé de jouir de notre impatience, incertain qu’il puisse se pourvoir au loin, et presque sûr d’être saisi et châtié s’il vend une édition contrefaite, n’accepte le papier manufacturé du libraire de la capitale, et que le commerçant étranger n’envoie que bien rarement dans nos provinces une marchandise dont elles seront fournies.

Mais si nous ne prenons pas ses livres, il ne prendra pas les nôtres… Et vous ne pensez pas que c’est votre bien qu’il vous envoie ; il n’a rien qui soit à lui, il produit à peine une malheureuse brochure dans une année.

Voilà, monsieur, ce que j’avais à vous dire des privilèges de la librairie. Je peux m’être trompé en quelques points, mais de peu d’importance ; avoir donné à certaines raisons plus de poids qu’elles n’en ont ; n’être pas encore assez profondément initié dans la profession pour atteindre à une juste évaluation des avantages et des désavantages ; mais je suis sûr de ma sincérité, sinon de mes lumières. Je n’ai ni dans cette affaire ni