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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/258

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d’un homme bien constitué, en empêche l’usage au moment qu’il s’y attend le moins.

Les anciens ont attribué cet état fortuit à des filtres ou à des ensorcellemens magiques. Platon avertit les nouveaux maries de tâcher de s’en garantir. Virgile désigne clairement le nouement le l’aiguillette dans ce vers de sa vii. églogue :

Terna tibi hæc primùm duplici diversa colore
Licia circumdo.

Les fables d’Apulée ne parlent que des enchantemens qu’employoit Pamphila fameuse magicienne, pour procurer l’impuissance au milieu des feux de l’amour. De là vient que Minutius Fœlix disoit au payen Cœcilius, que son Jupiter même n’avoit pas toujours eu le pouvoir de délier les charmes de la ceinture de Junon. Numantina femme de Plautius Sylvanus, fut accusée d’avoir par sortilege rendu son mari impuissant : Injecisse carminibus & veneficiis vecordiam marito, pour me servir de l’expression délicate de Tacite, annal. l. IV.

Il semble que les Jurisconsultes romains ne doutoient point du succès de l’art magique pour produire le nouement de l’aiguillette, car Paulus cite une loi qui défendoit d’user de ligature ; Pomponius Sabinus & Servius condamnent la pratique de ces sortes de nœuds enchanteurs. Enfin les historiens en citent des exemples remarquables. Amasis roi d’Egypte, dit Hérodien, ne put connoître sa femme Laodicée, parce qu’il avoit été lié par la magie. Sozomene, l. VIII. rapporte d’Honorius fils de Théodose, qu’après avoir épousé la fille de Stilico, une sorciere lui noua l’aiguillette, & l’empêcha par ce moyen d’accomplir le mariage. La reine Brunehaut, mere de Thierry roi de Bourgogne, le charma si bien, selon le récit d’Aimoin, qu’il ne put jouir d’Hermenaberge sa femme. Si l’on s’en rapporte à Grégoire de Tours, Eulasius éprouva le même sort ; car ayant enlevé d’un monastere de Langres une fille dont il étoit amoureux, & l’ayant épousée, ses concubines jalouses l’empêcherent par leurs sortileges, de consommer ce mariage ; concubinæ ejus, ce sont les propres paroles de l’historien, lib. X. ch. viij. instigante invidiâ, sensum ei oppilaverunt.

Mais depuis long-tems personne ne donne plus croyance à ces contes frivoles. On sait que les charmes dont la magie usoit autrefois pour inspirer de l’amour, ou pour arrêter subitement dans un corps bien organisé, le transport des desirs, tenoient toute leur puissance du trouble que des menaces effrayantes jettoient dans un esprit crédule. Le penchant à l’amour dans les uns, & dans les autres la crainte de ne pouvoir le satisfaire, rendoit leur résistance inutile, ou leurs efforts impuissans. Les organes qui renouvellent le monde depuis tant de siecles, sont échauffés ou glacés en un moment par l’empire de l’imagination. Quand elle est allarmée par de tristes illusions, il ne faut pour la guérir que la frapper plus fortement par des illusions plus flateuses & riantes. (D. J.)

NOVEMPAGI, (Géog. anc.) ville de la Toscane ; Pline, lib. III. ch. v. la met dans les terres, & Léander prétend que c’est aujourd’hui Bagnarea.

NOVEMPOPULANIE, (Géog. anc.) nom qui fut donné anciennement à une grande contrée de la France. Cette contrée étoit enfermée entre la Garonne, les Pyrénées & l’Océan, & s’étendoit même jusqu’à la Loire sous le regne d’Auguste. Sous Constantin le Grand, à ce que l’on croit, elle fut partagée en deux provinces nommées Aquitaine & Novempopulanie. Enfin Hadrien divisa toutes les terres qu’Auguste avoit renfermées dans l’Aquitaine, en trois provinces qui furent nommées l’Aquitaine premiere, l’Aquitaine seconde & la Novempopulanie. On appella alors Novempopulanie

l’ancienne Aquitaine, ou l’Aquitaine proprement dite, qui comprenoit du tems de César, les terres qui se trouvoient entre la Garonne, les Pyrénées & l’Océan.

Sous les regnes qui précéderent celui de Chilperic II. les Gascons quittant leurs montagnes, se rendirent maîtres du pays & des villes entre la mer, la Garonne & les Pyrénées ; pour lors la Novempopulanie commença à s’appeller Gascogne, du nom de ses vainqueurs. (D. J.)

NOVEM-VIRS, s. m. (Hist. anc.) surnom donné aux archontes d’Athènes, parce qu’ils étoient au nombre de neuf. Il y a grande apparence que ce furent les Romains qui leur donnerent ce titre après la conquête d’Athènes ; car ce nom est latin, tout semblable à ceux de triumvir, sextumvir, decemvir, &c. que les Romains tirolent du nombre des magistrats qu’ils désignoient par ce titre, & l’on sait qu’Athènes déchue de son ancienne puissance & soumise aux Romains, conserva toujours la liberté d’élire ses magistrats, & le droit de se gouverner selon ses lois. Enfin dans toute l’antiquité grecque on ne voit pas que le titre de novem-virs ait été donné aux archontes. Voyez Archontes.

NOVENDIAL, novendiale, (Hist. anc.) sacrifice que les Romains faisoient pendant neuf jours, comme son nom le marque assez, pour détourner les malheurs dont quelque prodige sembloit les menacer, & par cet acte de religion appaiser les dieux irrités. Ce fut Tullus Hostilius, selon Tite Live, qui le premier institua ces sacrifices sur la nouvelle qu’on rapporta d’une grêle tombée sur le mont Albain, d’une grosseur & d’une dureté si extraordinaire qu’on s’imagina que c’étoit une pluie de pierres. Les Romains fort crédules en fait de prodiges, sur-tout dans les premiers tems, eurent occasion de renouveller souvent le novendial.

NOVENDILES Jeux, (Antiq. rom.) c’étoit les mêmes que les jeux novemdiales ou funebres qu’on donnoit à la mort des grands hommes ou des empereurs. Voyez Novemdiales. (D. J.)

NOVENSILES, (Hist. anc.) c’étoient les dieux des Sabins que les Romains adopterent, & auxquels le roi Tatius fit bâtir un temple : leur nom signifie dieux nouvellement arrivés ou nouvellement connus. D’autres prétendent que ces dieux étoient ceux qui présidoient aux nouveautés ou au renouvellement des choses ; & selon quelques mythologistes, leur nom vient du nombre neuf, novem, parce qu’on en comptoit autant, savoir, Hercule, Romulus, Esculape, Bacchus, Enée, Vesta, la Santé, la Fortune & la Foi : d’autres enfin ont cru que c’étoient les neuf Muses. Mais tous ces auteurs ne nous ont point appris ce que ces dieux novensiles avoient de commun entre eux, ni ce qui les distinguoit des autres divinités.

NOUER, terme de manufacture ; & parmi les ouvriers qui se servent de la navette, rejoindre les fils de la chaîne ou de la trame de leur ouvrage, qui se rompent en travaillant.

On appelle nœud de Tisserand, le nœud qui sert à reprendre ces fils cassés.

Esnouer, c’est la façon qu’on donne à l’étoffe pour en ôter les nœuds ; les esnoueuses sont les ouvrieres qui les ôtent.

Nouer, (Jardinage.) se dit du fruit quand le bouton a formé la fleur, & qu’ensuite cette fleur se passe & que son pistil se change en un petit bouton qui est le fruit même.

Nouer, (Architect. Sculpt.) c’est lier & joindre. On dit un groupe de figures bien nouées ensemble.

NOVERUS, (Géog. anc.) ou Novarus ; ancien bourg de France en Saintonge, au-delà de la Charente par rapport à Bordeaux : Ausone y avoit sa