Aller au contenu

Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/325

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le chevalier Jonas Moore mena M. Flamsteed dans leurs assemblées, où il fut choisi pour être de leur compagnie.

On lut ensuite les propositions du françois, qui étoient les suivantes : I. Avoir l’année & le jour des observations ; II. la hauteur de deux étoiles, & savoir de quel côté du méridien elles paroissent, III. la hauteur des deux limbes de la Lune ; IV. la hauteur du pole, le tout en degrés & minutes.

Il étoit aisé de voir, par ces demandes, que le sieur de S. Pierre ignoroit que les meilleures tables lunaires different du ciel ; & par conséquent, que ce qu’il demandoit, ne suffisoit pas pour déterminer la longitude du lieu où ces observations auroient été faites ou se feroient, par rapport à celui pour lequel les tables lunaires étoient faites. C’est ce que M. Flamsteed représenta sur le champ à la compagnie. Mais ces messieurs faisant réfléxion sur le crédit que la protectrice du sieur de Saint-Pierre avoit à la cour, souhaiterent qu’on lui fournît ce qu’il demandoit. M. Flamsteed s’en chargea, & ayant trouvé le véritable lieu de la Lune par des observations faites à Derby le 23 Février 1673 ; & le 12 Novembre de la même année il donna au sieur de Saint Pierre des observations telles qu’il les demandoit. Comme il avoit cru qu’on ne pourroit pas les lui fournir, il dit qu’elles étoient supposées.

M. Flamsteed les délivra au docteur Pell le 19 Février  ; & celui-ci lui ayant rendu réponse quelque tems après, M. Flamsteed écrivit une lettre aux commissaires en anglois, & une autre en latin au sieur de Saint Pierre, pour l’assurer que les observations n’étoient point supposées, & pour lui prouver, que, quand même elles le seroient, si nous avions seulement des tables astronomiques qui pussent nous donner le véritable lieu des étoiles fixes, tant en longitude qu’en latitude, à moins d’une demi-minute près, nous pourrions espérer de trouver la longitude des lieux, par des observations lunaires, quoique différentes de celles qu’il demandoit ; mais que tant s’en falloit que nous eussions le véritable lieu des étoiles fixes, que les catalogues de Tycho Brahé erroient souvent de dix minutes & plus ; qu’ils étoient incertains jusqu’à trois ou quatre minutes, parce que Ticho supposoit une fausse obliquité de l’écliptique ; &c. que les meilleures tables lunaires différoient d’un , sinon d’un d’un degré du ciel ; & enfin qu’il auroit pu apprendre de meilleures méthodes de Morin son compatriote, qu’il auroit dû consulter avant que de s’avancer à faire des demandes de cette nature.

M. Flamsteed n’entendit plus parler du sieur de Saint-Pierre après cela ; mais il apprit que ses lettres ayant été montrées au roi Charles II, ce prince avoit été surpris de ce qu’il assuroit que les lieux des étoiles fixés étoient marqués faussement dans les catalogues, & avoit dit avec quelque vivacité « qu’il vouloit qu’on les observât de nouveau, qu’on les examinât, & qu’on les corrigeât pour l’usage de ses mariniers. »

On lui représenta qu’on auroit besoin d’un bon corps d’observations pour corriger les mouvemens de la Lune & des planetes, il répondit avec le même feu, qu’il vouloit que cela se fît ; & comme on lui demanda qui feroit, ou pourroit faire ces observations, il répliqua, « le même homme qui vous en fait connoître la nécessité. » Ce fut alors que M. Flamsteed fut nommé astronome du roi, avec 100 liv. sterlings d’appointement, & il reçut en même tems des assurances qu’on lui fourniroit de plus tout ce qui pourroit être nécessaire pour avancer l’ouvrage.

On pensa donc sans délai au lieu où l’on feroit

l’observatoire. On en proposa plusieurs, comme Hyde-Park, & le college de Chelsey. M. Flamsteed vint visiter les ruines de ce dernier ; & jugea qu’on pourroit s’y établir, d’autant plus qu’il seroit proche de la cour. Le chevalier Moore penchoit pour Hyde-Park ; mais le docteur Christophle Wren ayant parlé de Greenwich, on se détermina pour ce dernier endroit. Le roi accorda 500 liv. sterlings en argent, avec des briques de Tilbury Fort, où il y en avoit un magasin ; il donna aussi du bois, du fer, & du plomb ; & il promit de fournir tout ce qui seroit nécessaire d’ailleurs. Enfin, le 10 Août 1675 on posa les fondemens de l’observatoire royal de Greenwich, & il fut achevé très-promptement.

La différence du méridien de l’observatoire de Greenwich à celui de l’observatoire de Paris (qui fut bâti en 1665), est de 2. 1. 15. occid. La latitude de l’observatoire de Greenwich est 51. 28. 30. (D. J.)

OBSERVER. (Critiq. sacr.) Ce mot signifie épier, prendre garde à quelque chose. Job, xxiv. 15. L’adultere qui a peur d’être reconnu, observe à ne marcher que dans l’obscurité. Observer la bouche de quelqu’un, c’est épier ses paroles pour le surprendre ; observer la bouche du roi, os regis observare, Ecclés. viij. 2. c’est garder ses commandemens. Seigneur, si vous entrez dans un examen rigoureux de nos fautes : si iniquitates observaveris, qui pourra soutenir votre jugement ? dit David, ps. cxxix. 3. (D. J.)

OBSESSION du démon. (Théol.) On distingue l’obsession de la possession du démon, en ce que dans la possession, l’esprit malin est entré dans le corps de l’homme, & ne le quitte point, soit qu’il le tourmente & l’agite toujours, soit qu’il lui nuise seulement par intervalles. L’obsession, au contraire, est lorsque le démon, sans entrer dans le corps d’une personne, la tourmente & l’obsede au-dehors, à peu près comme un importun qui suit & fatigue un homme de qui il a résolu de tirer quelque chose. Les exemples d’obsession sont connus dans l’Histoire & dans l’Ecriture-sainte.

Il faut mettre au rang des obsessions ce que le Ier. liv. des Rois, c. xvj. v. 23. raconte de Saül qui de tems en tems étoit agité du mauvais esprit ; de même que ce qui est rapporté dans le livre de Tobie, du démon Asmodée qui faisoit mourir tous les maris qui vouloient approcher de Sara, fille de Raguel. Ce mauvais esprit obsédoit proprement cette jeune fille ; mais il n’exerçoit sa malice que contre ceux qui vouloient l’épouser. Il est aussi fort probable que ceux dont il est parlé dans S. Matthieu, c. iv. 24. & c. xvij. 14, & qui étoient principalement tourmentés pendant les lunaisons, étoient plutôt obsédés que possédés.

On regarde à bon droit, tant les obsessions que les possessions du démon, comme des punitions de la justice de Dieu, envoyées ou pour punir des péchés commis, ou pour s’être livré au démon, ou pour exercer la vertu & la patience des gens de bien ; car on sait qu’il y a des personnes obsédées, qui ont vécu d’une maniere très-innocente aux yeux des hommes.

Les marques de l’obsession sont, d’être élevé en l’air, & ensuite d’être rejetté contre terre avec force, sans être blessé ; de parler des langues étrangeres, qu’on n’a jamais apprises ; de ne pouvoir dans l’état de l’obsession, s’approcher des choses saintes, ni des Sacremens ; d’en avoir de l’aversion, jusqu’à n’en pouvoir entendre parler ; de connoître & de prédire des choses cachées, & de faire des choses qui surpassent les forces ordinaires de la personne ; si elle dit ou fait des choses qu’elle n’oseroit ni faire ni dire, si elle n’y étoit poussée d’ailleurs, & si les dispositions de son corps, de sa santé, de son tempérament, de ses inclinations, &c. n’ont nulle pro-