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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 11.djvu/833

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Phèdre fait adresser au paon les louanges les plus flatteuses, par Junon même :

Sed formâ vincis, vincis magnitudine.
Nitor smaragdi collo præfulget tuo,
Pictisque gemmis gemmeam caudam explicas
.

La Fontaine enchérit encore sur la cajolerie de la déesse : est-ce à toi, lui dit-elle,

Est-ce à toi d’envier la voix du rossignol ?
Toi que l’on voit porter à l’entour de ton col
Un arc-en-ciel nué de cent sortes de soies ;
Qui te panades, qui déploies
Une si riche queue, & qui semble à nos yeux
La boutique d’un lapidaire ?
Est-il quelque oiseau sous les cieux
Plus que toi capable de plaire ?

Les Hébreux ont connu les paons sous le nom de thuchim ; du-moins les interpretes s’accordent assez sur la signification de ce mot. La flotte de Salomon qui alloit à Ophir, a pû en rapporter à ce prince.

Ils étoient d’un grand prix chez les Grecs au rapport d’Athènée, l. XIV. c. xx. & le reproche qu’on fait à Périclès d’en nourrir, prouve assez leur rareté dans la Grece. Hortensius, le rival de Cicéron dans la carriere du barreau, homme magnifique dans ses dépenses, fut le premier, au rapport de Pline, qui fit apprêter des paons à Rome, dans un repas qu’il donna au college des augures.

Enfin, c’est l’oiseau favori des rois d’Angola & de Congo. Il n’appartient qu’à eux d’en entretenir ; & quiconque de leurs sujets en voleroit des plumes, seroit puni par l’esclavage.

Le paon d’Afrique ou de Guinée est nommé par les Naturalistes avis afra ou pavo africanus, & par les François demoiselle de Numidie : c’est un nom fort impropre que les dames lui donnerent sous le regne de Louis XIV. & MM. de l’acad. des Scienc. se crurent obligés de l’adopter.

Saint Augustin s’est imaginé que la chair de cet oiseau ne se corrompt qu’au bout d’un an : mais dans le pays de sa naissance, elle doit déja se corrompre au bout d’un jour. Il y a dans les écrits de ce pere de l’Eglise plus d’une erreur en physique. (D. J.)

Paon, vœu du, (Hist. de la Chevaler.) les entreprises de guerre & de chevalerie, sur-tout celles des croisades, étoient annoncées & publiées avec un appareil capable d’inspirer à tous les guerriers l’ardeur d’y concourir, & de partager la gloire qui devoient en être le prix. L’engagement en étoit scellé par des actes de religion, & par des vœux dont rien ne pouvoit dispenser.

Le plus authentique de tous les vœux étoit celui que l’on appelloit le vœu du paon ou du faisan. Ces nobles oiseaux, car on les qualifioit ainsi, représentoient par l’éclat & la variété de leurs couleurs, la majesté de leurs rois, & les superbes habillemens dont ces monarques étoient parés pour tenir ce que l’on nommoit tinel ou cour pléniere. La chair du paonou du faisand étoit, si l’on en croit nos vieux romanciers, la nourriture particuliere des preux & des amoureux. Enfin, selon Matthieu Pacis, une figure de paon servoit de but aux chevaliers qui s’exercoient à la course des chevaux & au maniement de la lance.

Le jour donc que l’on devoit prendre l’engagement solemnel, un paon ou bien un faisand quelquefois rôti, mais toujours paré de ses plus belles plumes, étoit apporté majestueusement par des dames ou par des demoiselles dans un grand bassin d’or ou d’argent, au milieu de la nombreuse assemblée de chevaliers convoqués. On le présentoit à chacun

d’eux, & chacun faisoit son vœu sur l’oiseau : ensuite on le reportoit sur une table, pour être enfin distribué à tous les assistans. L’habileté de celui qui tranchoit consistoit à le partager, de maniere que tous pussent en avoir. Les dames ou demoiselles choississoient un des plus braves de l’assemblée, pour aller avec elles porter le paon au chevalier qu’il estimoit le plus preux. Le chevalier choisi mettoit le plat devant celui qu’il croyoit mériter la préférence, coupoit néanmoins l’oiseau, & le distribuoit sous ses yeux ; & cette distinction si glorieuse, attachée à la plus éminente valeur, ne s’acceptoit qu’après une longue & modeste résistance. Mém. de l’acad. des Inscript. tome XX. (D. J.)

PAONNE, c’est la femelle du paon. Voyez Paon.

PAONEAU, on a donné ce nom aux jeunes paons. Voyez Paon.

PAOPHI, (Chronol. égypt.) c’est le second mois de l’année égyptienne. Il commence le 28 Septembre de la période julienne. (D. J.)

PAOUAOUCI, (Hist. mod. superstition.) c’est le nom que les habitans sauvages de la Virginie donnent à leurs enchantemens ou conjurations, au moyen desquels quelques Européens mêmes ont été assez simples pour croire que leurs devins pouvoient faire paroître des nuages, & faire tomber de la pluie.

PAPA, (Géog. mod.) petite ville de la basse Hongrie, au comté de Vesprin. L’archiduc Matthias la prit sur Mahomet III. en 1597. Elle est sur une montagne à 10 lieues S. de Raab, 18 O. de Bude. Long. 35. 45. latit. 47. 20.

PAPAN, s. m. (Hist. nat. Ornithol.) nom donné par les habitans des îles Philippines à une grande espece de canard, fort commun sur leurs lacs & leurs marais ; il est si beau, que le P. Camelli l’appelle le canard royal ; cependant on n’en fait pas autant de cas du canard des mêmes îles, nommé salagasir, & qui n’est pas plus gros que le poing. (D. J.)

PAPAS, (Hist. eccles) nom que les Grecs schismatiques donnent à leurs prêtres, & quelquefois à leurs patriarches ou évêques.

Ce mot signifie pere. Le P. Goar met une distinction entre παπᾶς & πάπας. Il dit que le premier titre est propre au souverain pontife, & que le second convient aux prêtres & même aux clercs d’un rang inférieur. Les Grecs appellent protopapas le premier d’entre les prêtres. Il y a encore aujourd’hui dans l’église de Messine en Sicile une dignité sous le nom de protopapas, que les Grecs y introduisirent probablement lorsque cette île étoit sous la domination des empereurs d’Orient. Le prélat de l’île de Corfou prend aussi le titre de protopapas. Scaliger remarque sur ce sujet que les Ethiopiens appellent les prêtres papasath, & les évêques épiscopasath. Acosta rapporte aussi que les Indiens du Pérou nomment leur grand-prêtre papas. Ducange, Glossar. latinit.

PAPAUTÉ, s. f. (Jurisprud.) est la dignité de souverain pontife ; on entend aussi quelquefois par le terme papauté le tems pendant lequel un pape a rempli le saint siege, comme quand on dit du pape Prosper Lambertini « que pendant sa papauté il a gouverné paisiblement toute l’Eglise ».(A)

PAPAYA ou PAPAU, s. m. (Hist. anc. Bot. exot.) genre de plante qui a deux sortes de fleurs ; l’une est un tuyau en forme d’étoile & stérile ; l’autre est en rose, composée de plusieurs pétales. Le pistil sort du calice, & devient dans la suite un fruit charnu qui a la forme d’un melon, & qui renferme des semences le plus souvent striées & recouvertes d’une coëffe. Tournefort, Inst. rei herb. app. Voyez Plante.

Son tronc est simple, nud ou sans branches, il n’en part que des pédicules pour les feuilles qui sont découpées, comme celles du ris simple ; sa fleur est