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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 3.djvu/335

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Les longues chevelures ont été principalement défendues à ceux qui embrassoient l’état ecclésiastique : la domination des peuples de la Germanie dans les Gaules y ayant introduit le relâchement des mœurs, plusieurs du clergé portoient de longs cheveux, malgré les lois de l’Église : cet abus fut réprimé dans plusieurs conciles. Un concile de plusieurs provinces des Gaules tenu à Agde l’an 509, ordonne que si des clercs portent de grands cheveux, l’archidiacre les leur coupera malgré eux. Cette défense pour les ecclésiastiques a toûjours été en vigueur ; il y eut même des tems où les longues chevelures furent interdites à tous les Chrétiens ; mais cette discipline n’a pas subsisté long-tems à leur égard. Voy. Clerc, Tonsure, Couronne.

Nos antiquaires & nos historiens se sont très-étendus sur la chevelure de nos princes : on sait très exactement une chose très-importante à savoir, qui d’entre eux porta des cheveux longs, & qui porta des cheveux courts. La question des cheveux longs & des cheveux courts a été dans son tems la matiere de plusieurs ouvrages polémiques. O curas hominum !

Aujourd’hui on porte ou on ne porte pas des cheveux ; on les porte longs ou courts sans conséquence. Les cheveux sont employés à faire des perruques, contre lesquelles à la vérité un savant homme a fait un traité. Voy. Perruque. Et cet habillement de tête est devenu si ordinaire par sa commodité, que les cheveux sont un objet de commerce assez considérable.

Les cheveux des pays septentrionaux sont plus estimés que les nôtres. De bons cheveux sont bien nourris, & ne sont ni trop gros ni trop fins. Les gros deviennent crêpus quand on les frise ; les fins ne tiennent pas assez la frisure. La longueur des cheveux doit être d’environ vingt-cinq pouces ; leur prix diminue à mesure qu’ils sont plus courts. On recherche plus ceux des femmes que ceux des hommes. On regarde beaucoup à la couleur ; les blonds sont les plus chers. Il y a peu de marchandise dont le prix soit aussi variable ; il y a des cheveux depuis quatre francs jusqu’à cinquante écus la livre. On prétend que les cheveux châtains se blanchissent comme la toile, en les lavant plusieurs fois dans de l’eau limonneuse, & les étendant sur le pré. Quant à l’emploi des cheveux, voyez les articles Perruquier & Perruque. Observons seulement que les cheveux étant une marchandise que nous tirons de l’étranger, il y auroit un avantage à ce que l’usage des perruques de fil-d’archal prévalût. Je ne sai si cet objet est assez considérable pour mériter l’attention. C’est à ceux qui veillent aux progrès du commerce à en être instruits.

Se coeffer en cheveux, c’est avoir les cheveux tressés, relevés, arrangés sur sa tête, sans bonnet ni coëffure. Porter de faux cheveux, c’est fournir par des tresses de cheveux, des tours, des coins, &c. les endroits de la tête qui sont dégarnis de cheveux naturels. La coëffure en cheveux & l’art des faux cheveux ont été à l’usage des Grecs & des Romains. On dit : faire les cheveux, couper les cheveux, rafraîchir les cheveux. Les rafraîchir, c’est en enlever au ciseau la petite extrémité, pour en hâter l’accroissement ; les couper, c’est les abattre entierement, pour y substituer la perruque ; les faire, c’est les tailler selon la mode regnante. Toutes ces opérations sont du perruquier, de même que celle de les friser. Voyez Friser.

On a attaché de tout tems la beauté de la chevelure à la longueur & à la couleur des cheveux ; mais tous les peuples n’ont pas eu dans tous les tems le même préjugé sur la couleur. C’est par cette raison qu’il a fallu imaginer pour ceux dont les cheveux n’étoient pas d’une couleur à la mode, des moyens de donner aux cheveux la couleur qu’on voudroit. En voici quelques-uns que nous ne garantissons pas.

Pour noircir les cheveux, mettez sur quatre pintes d’eau de fontaine froide, une demi-livre de chaux, & un quarteron de sel commun ; remuez ce mêlange de tems en tems pendant quatre jours ; tirez-le au clair, & le gardez. Prenez une demi-livre de noix de galle ; faites-les brûler dans un pot de fer ou de cuivre bien bouché, avec une demi-livre de graisse de bœuf. Quand le tout vous paroîtra en pâtée, laissez refroidir sans déboucher le vaisseau. Prenez ensuite votre masse, réduisez-là en poudre très-fine, jettez cette poudre sur deux pintes de l’eau que vous avez tirée au clair ; ajoûtant deux fiels de bœuf, une once de lytarge d’or, une once d’alun, une once de couperose, une once de summac, une once de verdet, une once de plomb brûlé, une once de mine de plomb, une once de vitriol, une once de sel ammoniac. Prenez encore un quarteron de noir d’Anvers ; mettez ce noir sur une chopine ou environ d’eau de chaux, préparée comme on a dit plus haut ; faites bouillir ; jettez ce second mêlange bouillant sur le mêlange précédent ; renfermez le tout dans une cruche ; laissez reposer cette cruche pendant trois ou quatre jours au coin du feu ; remuez de tems en tems. Lorsque vous voudrez faire usage de votre préparation, prenez-en dans un petit vaisseau, ajoûtez-y quatre à cinq gouttes d’eau seconde ; prenez une petite éponge, trempez-la dans ce dernier mêlange, & vous en frottez les cheveux. Continuez de vous frotter jusqu’à ce que vos cheveux ayent pris couleur. Ce procédé a été communiqué par feu madame la comtesse de B. au pere de M. Papillon, habile graveur en bois.

Voici un procédé plus simple. Prenez du brou de noix, mettez-le dans un alembic ; distillez ; recueillez l’eau claire qui vous viendra par la distillation, & vous frottez les cheveux de cette eau.

Il y en a qui pensent que de l’eau seconde répandue dans beaucoup d’eau, produiroit le même effet sans aucun danger. Mais l’usage du peigne de plomb, qu’on frotte avec la mine de plomb toutes les fois qu’on le nettoie, s’il n’est pas sûr, est du moins très-innocent.

* CHEVILLE, s. f. (Arts méch.) morceau de bois ou de fer, rond, plus ou moins long, selon le besoin, tantôt terminé en pointe, d’autres fois cylindrique, mais toûjours destiné à remplir un trou. Il n’y a guere d’assemblages de menuiserie ou de charpenterie, sans chevilles. Nous ne rapporterons pas ici toutes les machines où les chevilles sont d’usage. Dans les ouvrages de menuiserie & de charpente, les chevilles qui peuvent se déplacer & qui se déplacent quelquefois quand on desassemble le tout, comme il arrive dans les grandes machines qu’on ne laisse pas toûjours montées, s’appellent chevilles-coulisses : on les tient un peu plus longues que les autres qui sont à demeure ; elles ne sont pas à fleur de bois. Celles qui traversent les pieces & les excedent d’une portion considérable, formant des échelons de part & d’autre des pieces traversées, s’appellent chevilles-rances.

Les ouvriers en soie ont leurs chevilles. Voy. plus bas. Les Cordonniers ont les leurs. Les Bijoutiers donnent ce nom au fil d’or ou d’argent, qui passe dans l’ouverture de tous les charnons qui composent une charniere.

Cheville, en Anatomie ; voyez Malleole.

Chevilles de presse d’Imprimerie, sont deux morceaux de bois rond de neuf à dix pouces de long, chevillés l’un à côté de l’autre à deux pouces de distance dans l’épaisseur d’une des jumelles, de façon que les bouts relevent un peu, & vont toûjours en s’éloignant. Sur ces chevilles, l’Imprimeur pose ses balles montées, ou quand il veut se reposer, on quand il s’agit de faire quelque fonction de son mi-