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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvu/276

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connoissons un genre de preuves, auquel nous sommes accoûtumés à nous fier ; nous n’en avons même pas d’autre pour nous assurer de l’existence des objets, qui ne sont pas actuellement présens à nos sens, & sur lesquels cependant nous n’avons aucune espece de doute : c’est l’induction qui se tire des effets pour remonter à la cause. Le témoignage, source de toute certitude historique, & les monumens qui confirment le témoignage, ne sont que des phénomenes qu’on explique par la supposition du fait historique. Dans la Physique, l’ascension du vif-argent dans les tubes par la pression de l’air, le cours des astres, le mouvement diurne de la terre, & son mouvement annuel autour du soleil, la gravitation des corps, sont autant de faits qui ne sont prouvés que par l’accord exact de la supposition qu’on en a faite avec les phénomenes observés. Or, quoique nos sensations ne soient ni ne puissent être des substances existantes hors de nous, quoique les sensations actuelles ne soient ni ne puissent être les sensations passées, elles sont des faits ; & si en remontant de ces faits à leurs causes, on se trouve obligé d’admettre un système d’êtres intelligens ou corporels existans hors de nous, & une suite de sensations antérieures à la sensation actuelle, enchaînées à l’état antérieur du système des êtres existans ; ces deux choses, l’existence des êtres extérieurs & notre existence passée, seront appuyées sur le seul genre de preuves dont elles puissent être susceptibles : car puisque la sensation actuelle est la seule chose immédiatement certaine, tout ce qui n’est pas elle ne peut acquérir d’autre certitude que celle qui remonte de l’effet à sa cause.

Or on peut remonter d’un effet à sa cause de deux manieres : ou le fait dont il s’agit n’a pû être produit que par une seule cause qu’il indique nécessairement, ou qu’on peut démontrer la seule possible par la voie d’exclusion ; & alors la certitude de la cause est précisément égale à celle de l’effet : c’est sur ce principe qu’est fondé ce raisonnement, quelque chose existe : donc de toute éternité il a existé quelque chose ; & tel est le vrai fondement des démonstrations métaphysiques de l’existence de Dieu. Cette même forme de procéder s’employe aussi le plus communément dans une hypothèse avoüée, & d’après des lois connues de la nature : c’est ainsi que les lois de la chûte des graves étant données, la vîtesse acquise d’un corps nous indique démonstrativement la hauteur dont il est tombé. L’autre maniere de remonter des effets connus à la cause inconnue, consiste à deviner la nature précisément comme une énigme, à imaginer successivement une ou plusieurs hypothèses, à les suivre dans leurs conséquences, à les comparer aux circonstances du phénomene, à les essayer sur les faits comme on vérifie un cachet en l’appliquant sur son empreinte : ce sont-là les fondemens de l’art de déchiffrer, ce sont ceux de la critique des faits, ceux de la Physique ; & puisque ni les êtres extérieurs, ni les faits passés n’ont, avec la sensation actuelle, aucune liaison dont la nécessité nous soit démontrée, ce sont aussi les seuls fondemens possibles de toute certitude au sujet de l’existence des êtres extérieurs & de notre existence passée. Je n’entreprendrai point ici de développer comment ce genre de preuves croît en force depuis la vraissemblance jusqu’à la certitude, suivant que les degrés de correspondance augmentent entre la cause supposée & les phénomenes ; ni de prouver qu’elle peut donner à nos jugemens toute l’assûrance que nous desirons : cela doit être exécuté aux articles Certitude & Probabilité. A l’égard de l’application de ce genre de preuves à la certitude de la mémoire, & à l’existence des corps, voyez Identité personnelle, Mémoire, & Immatérialisme.

Existence, Subsistance, (Grammaire.) Il ne

faut pas confondre ces deux mots : l’existence se donne par la naissance ; la subsistance, par les alimens. Le terme d’exister, dit à ce sujet l’abbé Girard, n’est d’usage que pour exprimer l’évenement de la simple existence ; & l’on employe celui de subsister, pour désigner un évenement de durée qui répond à cette existence, ou à cette modification. Exister ne se dit que des substances, & seulement pour en marquer l’être réel ; subsister s’applique aux substances & aux modes, mais toûjours avec un rapport à la durée de leur être. On dit de la matiere, de l’esprit, des corps, qu’ils existent. On dit des états, des ouvrages, des affaires, des lois, & de tous les établissemens qui ne sont ni détruits, ni changés, qu’ils subsistent. Article de M. le Chevalier de Jaucourt.

* EXITERIES, adj. pris subst. (Myth.) fêtes que les Grecs célébroient par des sacrifices & des vœux adressés aux dieux, lorsque leurs généraux étoient sur le point de se mettre en marche contre quelque ennemi. Les particuliers avoient aussi leurs exitéries qu’ils fêtoient, lorsqu’ils partoient pour quelque voyage.

EXMOUTH, (Géog. mod.) ville de la province de Devon en Angleterre. Long. 14. 20. lat. 50. 35.

EXOCATACELE, s. m. (Hist. anc.) dans l’antiquité étoit une dénomination générale, sous laquelle on compreneit plusieurs grands officiers de l’église de Constantinople ; comme le grand-économe, le grand-chapelain, le grand-maître de la chapelle, le gardien de l’argenterie, le grand-garde des archives, le maître de la petite chapelle, & le premier avocat de l’église. Chambers. (G)

EXOCIONITES, s. m. pl. nom donné aux Ariens d’un lieu appellé Exocionium, dans lequel ils se retirerent & tinrent leurs assemblées, après que Théodose le grand les eut chassés de Constantinople. (G)

EXODE, s. m. (Théol. & Hist. sacrée.) livre canonique de l’ancien Testament, le second des cinq livres de Moyse. Voyez Pentateuque.

Ce nom, dans son origine greque, signifie à la lettre voyage ou sortie ; & on le donne à ce livre, pour marquer celle des enfans d’Israel hors de l’Egypte sous la conduite de Moyse. Il contient l’histoire de tout ce qui se passa dans le desert, depuis la mort de Joseph jusqu’à la construction du tabernacle, pendant quatre ans.

Les Hébreux l’appellent veelle semoth, des premiers mots qui le commencent, & qui signifient en latin hæc sunt nomina, suivant leur coûtume de désigner les livres de l’Ecriture, non par des titres généraux qui en désignent le contenu, mais par les premiers mots de chacun de ces livres. Voy. Bible. (G)

Exode, exodium, (Théol.) dans les septante signifie la fin ou la conclusion d’une fête. Voy. Fête.

Ce mot signifioit proprement le huitieme jour de la fête des tabernacles, qu’on célébroit principalement en mémoire de l’exode ou de la sortie d’Egypte, & du séjour des Israélites dans le desert.

Exode, s. f. (Littérat.) en latin exodia ; poëme plus ou moins châtié, accompagné de chants & de danses, & porté sur le théatre de Rome pour servir de divertissement après la tragédie.

Les plaisanteries grossieres s’étant changées en art sur le théatre des Romains, on joüa l’Atellane, comme on joue aujourd’hui parmi nous la piece comique à la suite de la piece sérieuse. Le mot exode, exodia, signifie issues. Ce nom lui fut donné à l’imitation des Grecs, qui nommoient exodion le dernier chant après la piece finie. L’auteur étoit appellé exodiarius, l’exodiaire. Il entroit sur le théatre à la fin des pieces sérieuses, pour dissiper la tristesse & les larmes qu’excitent les passions de la tragédie, & il joüoit cependant la piece comique avec