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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 6.djvu/507

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rer une grande chaleur sans se brûler. Il y a de ces sortes de fers qui deviennent plus cassans en les forgeant, & ne peuvent être ni dressés ni tournés à froid.

Fer doux. Le fer doux se connoît à la cassure, qui doit être noire tout-en-travers de la barre : alors il est malléable à froid, & tendre à la lime ; mais il est plus sujet à être cendreux, c’est-à-dire moins clair & moins luisant après qu’il est poli ; il s’y trouve des taches grises : ce n’est pas qu’il ne se trouve des barres de ce fer qui n’ont point ces défauts.

Il y a d’autres fers qui à la cassure paroissent gris, noirs, & tirant sur le blanc, qui sont beaucoup plus roides que le précédent ; ils sont très-bons pour les Maréchaux, les Serruriers, les Taillandiers, & en général tous les ouvriers en gros ouvrages noirs ; car à la lime on lui remarque des grains qu’on ne peut emporter.

Il y a d’autres fers mêlés à la cassure ; ils ont une partie blanche, & l’autre grise ou noire ; le grain en est un peu plus gros qu’aux fers ci-dessus ; ils sont réputés les meilleurs ; ils se forgent facilement ; ils se liment bien prenant un beau poli, & ne sont sujets ni à des grains, ni à des cendrures, parce qu’ils s’affinent à mesure qu’on les travaille.

Il y a une autre sorte de fer qui a le grain fort petit, comme l’acier ; il est pliant à froid, & bouillant à la forge ; ce qui le rend difficile à forger & à limer. Il est bon pour les outils & les travaux de la terre.

Fer rouverain, il se connoît à des gerçures ou découpures qu’on voit traverser les quarrés des barres ; il est pliant, malléable à froid, & cassant à chaud ; il rend une odeur de soufre à la forge ; si on le frappe, il en sort des étincelles semblables à de petites flammes en étoiles. Quand on le chauffe un peu plus blanc que couleur de cerise rouge, il s’ouvre à chaud, & quelquefois presque tout en-travers de la barre, sur-tout lorsqu’on le bat, ou qu’on le ploye. Il est sujet à avoir des pailles & des grains : c’est le défaut du fer d’Espagne.

Les vieux fers qui ont été exposés long-tems à l’air, sont sujets à devenir rouverains.

Fleur de Fer, voyez Flos Martis.

Fer, (Marque des Fers.) droit domanial de la couronne, faisant partie de la ferme générale des aides, consistant au dixieme qui se devoit prendre sur tout ce qui se tiroit des mines & minieres du royaume, dont Charles VI. ordonna la levée à son profit par lettres patentes du 30 Mai 1413, comme lui appartenant de plein droit en qualité de roi, & non aux seigneurs qui le prétendoient.

Il fut rendu par la suite plusieurs édits & arrêts, pour créer divers officiers, remédier aux abus, & empêcher les inconvéniens qui n’arrivoient que trop fréquemment par la rupture des ouvrages. En 1602, la charge le sur-intendant des mines fut créée en faveur de Roger de Bellegarde, & Beringhen en eut le contrôle général. Le meilleur moyen qui fut employé, fut de rétablir l’usage du fer doux, & de ne permettre celui du fer aigre qu’aux ouvrages dont la rupture ne pouvoit causer aucun accident ; il fut créé à cette occasion de nouveaux officiers, pour connoître, marquer, & distinguer le fer doux d’avec le fer aigre ; il fut attribué à tous ces officiers divers droits. En 1628, le fer mis en œuvre & apporté des pays étrangers, fut déclaré sujet, ainsi que celui des forges du royaume, & assujettis à être conduits & déchargés aux bureaux pour y payer les droits.

La quincaillerie étant un composé de fer & d’acier, fut déclarée sujette en 1636.

La mine de fer est sujette auxdits droits, sauf l’évaluation que l’on a fixée au quart ; & s’il est réduit

en quintal de gueuses, il paye comme fer parfait, parce que les fontes ne sont plus sujettes à aucun déchet. Ces droits sont fixés par l’ordonnance de 1680, sur le fait des aides & entrées, à raison de 13 sous 6 den. par quintal de fer, 18 sous par quintal de quincaillerie grosse & menue, 20 sous par quintal d’acier, & 3 sous 4 den. par quintal de mine de fer, sur le pié de 100 l. poids de marc par quintal, pour distinguer le poids de forges qui est beaucoup plus fort.

Il n’y a nulle exemption de ces droits, ni aucun privilége ; les fermiers du domaine, les propriétaires des forges de quelque qualité qu’ils soient, même les ecclésiastiques pour celles qui sont du temporel de leurs bénéfices, encore qu’ils les fassent valoir par les mains de leurs domestiques, tous indistinctement y sont assujettis. Les boulets de canon, bombes, & grenades, quoique pour le service de S. M. y ont été déclarés sujets.

Ces droits font partie de la ferme générale, & sont soûfermés pour tout le royaume à une seule compagnie. Les baux sont de six ans, comme ceux des autres droits d’aides. La régie est la même. Cet article est de M. Dufour.

* Fer-blanc. M. Colbert appella en France les premiers manufacturiers en fer blanc qu’on y ait vûs. Les uns s’établirent à Chenesey en Franche-Comté, les autres à Beaumont-la-Ferriere en Nivernois, mais ces ouvriers précieux ne trouvant pour les soûtenir ni une intelligence ni une protection telles que celles qui les avoient attirés, n’eurent aucun succès, & se retirerent. Il s’en éleva une manufacture à Strasbourg sur la fin de la régence. Il y a actuellement quatre manufactures de fer-blanc en France : 1° celle de Mansvaux en Alsace, établie il y a quarante-deux ans : 2° celle de Bain en Lorraine, établie en 1733, sur des lettres-patentes du duc François III. confirmées en 1745 par le roi Stanislas de Pologne : 3° celle de Moramber en Franche-Comté, établie depuis cinq années : 4° une établie depuis trois ans à une lieue de Nevers. On y porte le fer en petits barreaux : le meilleur est celui qui s’étend facilement, qui est ductile & doux, & qui se forge bien à-froid ; mais il ne faut pas qu’il ait ces qualités avec excès. On le chauffe en A ; on l’applatit d’abord un peu en B, & dès le premier voyage sous le gros marteau C, on le coupe en petits morceaux qu’on appelle semelles. La semelle peut fournir deux feuilles de fer-blanc, d d d. On chauffe ces morceaux jusqu’à étinceler violemment, dans l’espece de forge A ; on les applatit grossierement. On rechauffe une troisieme fois, & on les étend sous le même gros marteau C, jusqu’à doubler à-peu-près leurs dimensions ; puis on les plie en deux, suivant la longueur. On les trempe dans une eau trouble qui contient une terre fabuleuse, à laquelle il seroit peut-être très-à-propos d’ajoûter du charbon en poudre, les semelles en seroient moins brûlées. L’effet de cette immersion est d’empêcher les plis de souder. Quand on a une grande quantité de ces feuilles pliées en deux, on les transporte à la forge S ; on les y range à côté les unes des autres verticalement, sur deux barres de fer qui les tiennent élevées, & l’on en forme une file plus ou moins grande, selon leur épaisseur : on appelle cette fille, une trousse. Un levier de fer qu’on leve ou qu’on abaisse quand il en est tems, sert à tenir la trousse serrée : on met ensuite dessous & dessus du plus gros charbon, & l’on chauffe. Quand on s’apperçoit que la file est bien rouge, un ouvrier prend un paquet ou une trousse de quarante de ces feuilles doubles, & le porte sous le marteau. Ce second marteau est plus gros que le précédent ; il pese 700, & n’est point acéré. Là ce paquet est battu jusqu’à ce que les feuilles ayent acquis à-peu-près leur dimension ; mais il