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Page:Diderot - Encyclopedie 1ere edition tome 9.djvu/348

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le nom se lit des deux côtés, même sans presqu’aucune différence dans la légende. Témoin un petit médaillon de potin frappé en Egypte, sur lequel on trouve des deux côtés, cabeina, ce bacth. L. IE, quoique sur un de ces côtés on voye la tête de Sabine, & sur l’autre une figure de femme assise, tenant de la main droite des épis, & une haste de la gauche. Tel est encore un médaillon d’argent de Constantin, où du côté de la tête on lit Constantinus max. Aug. au revers, Constantinus Aug. avec trois labarum, dans l’exergue sit ; & cet autre médaillon aussi d’argent, de l’empereur Julien, où autour de la tête sans couronne, on trouve FL. CL. Julianus Nob. Cæs. au revers trois labarum pour légende, DN. Julianus Cæs. dans l’exergue T. Con. Enfin une médaille de Maximien Daza, qu’on peut placer également dans le moyen & dans le petit bronze, où l’on voit d’un côté Maximien à mi-corps, ayant la tête couronnée de laurier, & la poitrine couverte d’une cuirasse ; il tient de la main droite un globe, sur lequel est une victoire ; sa gauche est cachée par son bouclier, dont la partie supérieure représente deux cavaliers courant à toute bride de gauche à droite, précédés par la Victoire. Dans la partie inférieure sont quatre petits enfans debout, qui désignent les quatre saisons de l’année. La légende de ce côté est Maximinus Nob. Cæs. au revers un homme debout, vétu du paludament, tenant de la droite un globe sur lequel est une Victoire ; il s’appuie de la gauche sur une haste ; on lit autour, Maximinus nobilissimus Cæs. dans le champ à gauche E, dans l’exergue ANT.

Quand les médailles n’ont point de têtes, les figures qui y sont représentées en tiennent lieu ; & alors la légende du revers est une espece d’inscription. Par exemple, dans la médaille de Tibere, en reconnoissance du soin qu’il prit de faire rétablir les villes d’Asie qu’un tremblement de terre avoit ruinées, il est représenté assis sur une chaise curule, avec ces mots : civitatibus Asiæ restitutis, & le revers n’a qu’une simple légende, Tiberius Cæsar divi Augusti filius Augustus Pont. Max. Tr. Pot. XXI.

Quant à ce qui concerne les médailles des villes & des provinces, comme elles portent ordinairement pour tête le génie de la ville, ou celui de la province, ou quelque autre déité qu’on y adoroit, la légende est aussi le nom de la ville, de la province, de la déité, ou de tous les deux ensemble, Ἀντιόχειον Συρακόσιον, &c. Ζεὺς φίλιος Συρακοσίων, Ἡρακλέους Θκιον, &c., soit que le nom de la ville se lise au revers, & que le nom de la déïté demeure du côté de la tête, soit que le nom de la ville serve de légende à la déïté, comme Καταναίων à Jupiter Hammon, Μεσσανίων à Hercule, &c.

Dans ces mêmes médailles, les revers sont toûjours quelques symboles de ces villes, souvent sans légende, plus souvent avec le nom de la ville, quelquefois avec celui de quelque magistrat, comme Ἀγυριναίων ἐπὶ Σωπάτρου, &c. ensorte qu’il est vrai de dire que la légende dans ces sortes de médailles ne nous apprend que le nom de la ville, ou celui du magistrat qui la gouvernoit, lorsque la médaille a été frappée.

Par-tout ailleurs les belles actions sont exprimées sur le revers, soit au naturel, soit par des symboles, dont la légende est l’explication. Au naturel, comme quand Trajan est représenté mettant la couronne sur la tête au roi des Parthes, rex Parthis datus. Par symbole, comme lorsque la victoire de Jules & d’Auguste est représentée par un crocodile enchaîné à un palmier avec ces mots, Egypto captâ. L’on voit aussi dans Hadrien toutes les provinces qui le reconnoissent pour leur réparateur, & ceux qui n’en connoîtroient pas les symboles, apprendroient à les

distinguer par les légendes ; restitutori Galliæ, restitutori Hispaniæ, &c. Ainsi les différentes victoires désignées par des couronnes, par des palmes, par des trophées, & par de semblables marques qui sont d’elles-mêmes indifférentes, se trouvent déterminées par la légende, Asia subacta d’Auguste, Alemannia devicta de Constantin le jeune, Judæa capta de Vespasien, Armenia & Mesopotamia in potestatem populi romani redactæ de Trajan, ou simplement, de Germanis, de Sarmatis, de Marc Aurele ; car les légendes les plus simples ont ordinairement le plus de dignité.

Mettant donc à part les légendes de la tête destinées à marquer le nom, soit tout seul, comme Brutus, Cæsar, soit avec les qualités, ainsi que nous venons de le dire ; les autres légendes ne doivent être que des explications, des symboles, qui paroissent sur les médailles, par lesquelles on prétend faire connoître les vertus des princes, certains évenemens singuliers de leur vie, les honneurs qu’on leur a rendus, les avantages qu’ils ont procurés à l’état, les monumens de leur gloire, les déités qu’ils ont le plus honorées, & dont ils ont cru avoir reçu une protection particuliere : car les revers n’étant chargés que de ces sortes de choses, les légendes y ont un rapport essentiel ; elles sont comme la clef des types, que l’on auroit bien de la peine à deviner sans leur secours, sur-tout dans les siecles éloignés, & dans des pays où les usages sont tout différens de ceux des anciens.

C’est en cela qu’excellent les médailles du haut empire, dont les types sont toûjours choisis & appliqués par quelque bonne raison que la légende nous découvre : au lieu que dans le bas empire on ne cesse de répéter les mêmes types & les mêmes légendes ; & l’on voit que les uns & les autres sont donnés indifféremment à tous les empereurs, plutôt par coutume que par mérite. Témoin le gloria exercitus, felix temporum renovatio.

Comme les vertus qui rendent les princes plus aimables & plus estimables à leurs peuples sont aussi ce que les revers de leurs médailles représentent ordinairement, les légendes les plus communes sont celles qui font connoître ces vertus, tantôt par leur simple nom, comme dans ces revers de Tibere qu’il méritoit si mal, moderationi, clementiæ, justitiæ ; tantôt en les appliquant aux princes, ou par le nominatif ou par le génitif, spes Augusta, ou spes Augusti ; constantia Augusta, ou constantia Augusti, gardant aussi indifféremment le même régime à l’égard de la vertu même : virtus Aug. ou virtuti Aug. clementia, ou clementiæ, &c.

Les honneurs rendus aux princes consistent particulierement dans les surnoms glorieux qu’on leur a donnés, pour marquer ou leurs actions les plus mémorables, ou leurs plus éminentes vertus ; c’est ainsi que je les distingue des monumens publics qui devoient être les témoins durables de leur gloire. Ces surnoms ne peuvent être exprimés que par la légende, soit du côté de la tête, soit du côté du revers.

Quant aux honneurs rendus aux princes après la mort, qui consistoient à les placer au rang des dieux, nous les connoissons par le mot de consecratio, par celui de pater, de divus, & de Deus. Divo pio, divus Augustus pater, Deo & Domino caro. Quelquefois autour des temples & des autels on mettoit memoria felix, ou memoriæ æternæ. Quelquefois sur les médailles des princesses on lit æternitas, ou syderibus recepta ; & du côté de la tête diva, ou en grec Θεά.

Les légendes qui expriment les bienfaits répandus sur les villes, sur les provinces, & sur l’empire, sont ordinairement fort courtes & fort simples ; mais elles ne laissent pas d’être magnifiques. Par