Aller au contenu

Page:Driant - L’invasion noire 1-Mobilisation africaine,1913.djvu/208

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les hardis explorateurs ne se doutaient guère que les Noirs se souciaient, à cette heure, de leurs articles autant qu’un requin, en présence d’un homme tombé à la mer, se préoccupe du chapeau qui flotte à ses côtés.

Ce à quoi Guy de Brantane avait donné tous ses soins, c’était au garde-manger et à la cave.

Il y avait dans ce dernier réduit, dont il s’était réservé la clé, quantité de bonnes choses empruntées, moyennant finances, aux meilleurs hôteliers de la capitale.

Et Guy connaissait les bons endroits.

Quant aux crus (Terminus) que lui avait fournis le célèbre hôtel de la gare Saint-Lazare, ils eussent ranimé les courages les moins éprouvés, et notre boulevardier comptait sur eux pour maintenir à un niveau constant le moral de tout le monde.

En un mot, il était muni du nécessaire et même du superflu pour un voyage au long cours.

Pour être moins encombrant, le lest était en grande partie formé de barres plates en plomb superposées, du poids de 2 kilogrammes chacune, maintenues contre le bordage par des bandes de toile.

Il y avait évidemment un inconvénient sérieux à laisser tomber ces projectiles d’un nouveau genre à la surface terrestre, et jamais les aéronautes n’eussent songé a les utiliser en Europe, où les gens sont très susceptibles et dont la surface est trop uniformément peuplée ; mais en Afrique, où les déserts abondent, ce serait bien le diable, avait dit l’ingénieur, si le projectile-lest rencontrait un nègre.

— Et quand même il en rencontrerait quelques-uns, avait répondu Guy.

— Ils ont le crâne si dur !

— Et quand même ça défoncerait quelques crânes, avait ajouté Guy.

Et tous deux avaient terminé cette courte et substantielle conversation par un geste montrant suffisamment que les idées philanthropiques et humanitaires ne les étoufferaient ni l’un ni l’autre dès qu’ils planeraient sur le continent voisin.

— Le lendemain de ce jour, les nombreux curieux qui couvraient les hauteurs du Roucas-Blanc ; la plate-forme de