Aller au contenu

Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/244

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Ce malfaiteur qui avait échappé non seulement aux détectives anglais, mais à toutes les polices du continent, qui commandait à une véritable armée de criminels répartis sur toute la surface de l’Europe, cet audacieux qui avait fait graver la nuit au fronton du palais de Westminster : « Haine mortelle à la patrie anglaise ».

Cet être insaisissable qui avait rêvé un soulèvement général des peuples contre l’impôt du sang, et dont les « compagnons » avaient favorisé la fuite à travers la France et l’Espagne, il était là, devant un tribunal anglais.

Il était venu se faire prendre sur un territoire anglais, large comme la main, alors qu’autour de lui il avait l’espace, et que dans l’armée noire l’attendaient la gloire et les douceurs de la vengeance contre ces patries d’Europe qu’il haïssait toutes également.

Il y eut un nouveau silence.

Et Zérouk lui aussi se disait que c’était pour une femme qu’il avait risqué et perdu cette partie.

Une effroyable rage contre elle et contre celui qu’elle aimait jeta à son cerveau un afflux de sang : son visage s’empourpra ; ses yeux lancèrent des éclairs.

Puis une bouffée d’orgueil le grisa : il avait vu quel effet avait produit sur ces hommes le nom retentissant qu’il portait.

Il dédaigna de feindre plus longtemps, et se redressant il parla :

— Oui, dit-il les bras croisés, fièrement campé, la tête haute et le regard méprisant, oui, je suis Smith Elton…

Vous êtes les plus forts et vous allez me tuer : c’est la loi humaine.

Mais sachez que je ne vous crains pas, que je vous méprise, vous surtout soldats, séides exécrés d’une société maudite, représentants imbéciles de cette utopie séculaire, « la Patrie ».

La patrie, reprit-il, j’espérais bien en détruire jusqu’au nom parmi vous ; c’est au nom de la patrie que des barrières s’élèvent entre des peuples, que des tyrans ou des assemblées font massacrer des millions d’êtres humains ; c’est en son nom que les nations se ruinent en armements, au lieu d’alléger les misères et d’éteindre le paupérisme ; enfin, c’est