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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/295

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Il voyait le spectacle humain de plus haut.

Et ce qu’il ne pouvait admettre, c’était ce dédain, cette main-mise d’une race sur une autre.

Ce qui lui paraissait odieux et souverainement injuste, c’était cette exploitation des Noirs par les Blancs depuis le commencement du monde.

Avec beaucoup de musulmans instruits, il ne croyait pas aux récits du Rauzat-us-Safa (jardin de pureté), qui est la bible de l’Islam et qui offre tant de points communs avec la Genèse des chrétiens.

Il regardait comme une puérilité l’histoire de Cham, maudit par son père Noé, parce qu’il s’était, pendant son sommeil, moqué de sa nudité et il n’avait jamais pu croire qu’après cette malédiction, ses descendants, devenus noirs, fussent asservis à jamais à ceux de Sem et de Japhet.

Est-ce parce qu’il avait subi l’injustice des événements, comme il appelait les intrigues anglaises qui l’avaient détrôné ? mais ses croyances avant tout monothéistes considéraient la justice comme l’attribut capital et l’essence même de la divinité, et il lui paraissait impossible qu’un dieu juste eût créé une race privilégiée et une race sacrifiée.

Il allait donc essayer de changer tout cela.

L’état de choses qui en résulterait laisserait encore d’un côté des malheureux, de l’autre des jouisseurs ; mais les rôles seraient renversés et la justice telle que la comprenait ce terrible juge humain y trouverait son compte.

Le second jour de marche, au coucher du soleil, la Ville sainte se découvrit soudain à la vue des innombrables pèlerins qui couvraient les collines et convergeaient vers elle. Elle se déroula à leurs pieds avec ses terrasses blanches, ses maisons étagées parsemées de koubas, ses hauts minarets aux innombrables arabesques, ses coupoles gracieuses et son temple aux mille colonnes, centre religieux de l’Islam.

Et tous, comme s’ils eussent obéi à une impulsion mystérieuse, courbèrent le front dans la poussière.

La Mecque (Mekka en arabe) est appelée par les auteurs musulmans la « Mère des villes ».

Un livre entier a été composé des appellations qui lui ont été données par les fidèles, et parmi lesquelles les plus