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Page:Driant - L’invasion noire 2-grand pèlerinage à la Mecque,1913.djvu/325

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aux nouveaux maîtres qui se disputaient ses villes et qui, chaque année, emportaient un lambeau de son territoire.

Au Nord, la Russie pouvait, de la Caspienne devenue un lac russe, atteindre Téhéran en quelques jours de marche : déjà elle avait gagné le Schah à sa politique et lui avait imposé la construction d’un réseau ferré rattaché à la grande ligne de Samarkande.

Au Sud, les Anglais dans le golfe Persique, devenu mer anglaise, tenaient les principaux revenus douaniers du royaume et exerçaient une pression constante sur l’autocrate persan.

C’était même à la rivalité de ses deux redoutables voisins que la Perse devait de vivre encore ; mais il était évident que le temps était proche où le Tzar blanc allait poser sa griffe puissante sur l’ancien royaume de Zoroastre, et fiers de leur long passé de gloire, se rappelant que leurs traditions les faisaient remonter aux premiers âges de l’humanité, les Iraniens se levèrent en foule derrière le croissant pour éviter de disparaître comme nation libre.

Bien que formés de populations hétérogènes et ayant mêlé leur sang à celui de tous les envahisseurs de leur pays, ils formaient un bloc compact, grâce à l’unité religieuse, et sentant frémir non loin d’eux leurs frères de l’Inde, se rappelant les paroles enflammées de leurs poètes Hafiz et Sadi, ils accoururent à la curée de l’Europe.

Les uns s’étaient retrempés au passage de Meched, la Ville sainte, aux coupoles dorées, dont la bibliothèque est célèbre dans le monde islamique ; d’autres avaient traversé le désert de Lout « semblable à une masse de métal incandescent », ou les marécages salins et boueux de Kachan : ils étaient 900.000 et derrière eux 150.000 Afghans, Ghilzaï et Dourani, au teint olivâtre, s’organisaient pour la même lutte.

Mais ceux qui brillaient le plus au milieu de cette nouvelle coulée humaine, arrivant d’Orient, étaient les merveilleux cavaliers kourdes ; un dicton musulman dit : « que le plus misérable d’entre eux possède une monture digne des haras royaux », et en effet leurs chevaux offrant une grande similitude avec le cheval de course anglais, étaient d’une beauté et d’une vigueur incomparables.